Dans les archives de l’Union syndicale CGT des métallurgistes de la région parisienne, une petite boîte verte en carton intrigue par son format. En l’ouvrant, on y découvre soigneusement rangées les cartes d’identité des trésoriers des syndicats locaux de la métallurgie, pour les années 1947 à 1949.
Nous sommes ici à une période charnière de l’histoire du mouvement syndical, puisque l’on passe de 201 213 syndiqués revendiqués à la fin de l’année 1945, répartis dans 88 syndicats locaux de la métallurgie et 2 119 sections syndicales d’entreprises à 44 000 adhérents (à 10 timbres mensuels en moyenne par carte) en 1949, répartis dans 49 syndicats locaux de la métallurgie. Les causes de ce déclin sont multiples. La scission de Force ouvrière, fin 1947, a pesé, par le départ d’adhérents ou la non-reprise de cartes syndicales. La répression patronale et policière refroidit les plus indécis, lorsque ce n’est pas la situation internationale qui nourrit l’hémorragie des effectifs.
Que nous apprennent ces cartes d’identité ? Au total 81 personnes sont recensées, pour 67 syndicats locaux de la métallurgie. On ne croise que deux femmes, Alice Bachir et Cavalloni, en sachant que 21 noms ne font pas mention du genre. On y trouve également la mention de l’adresse personnelle du trésorier. L’une d’elles retient plus particulièrement l’attention. Il s’agit de celle de Maurice Lurot, trésorier du syndicat local de la métallurgie de Paris (18e arrondissement), tué par la police, comme six algériens avec lui, lors de la manifestation du 14 juillet 1953 organisée par la gauche syndicale et communiste.
L’intérêt principal de ce petit fonds d’archives réside dans la présence de portraits sur 49 cartes d’identité, ainsi que sur la possibilité de travailler sur une approche prosopographique des trésoriers de syndicat, un mandat méconnu et pourtant essentiel à la vie de l’organisation syndicale. Parmi les 81 personnes, seules cinq ont une notice biographique dans le Maitron (https://maitron.fr/), le chantier est donc ouvert !