L’offensive menée par l’UIMM sur la grille de classifications, dans le cadre des négociations sur le dispositif conventionnel, doit attirer notre attention sur le droit à la formation professionnelle continue pour les salariés et les privés d’emploi.
En effet, dans la mesure où le patronat vise à payer le salarié, non pas à son niveau de qualification et d’expériences, mais aux tâches et aux postes occupés, on voit bien là le danger qui plane au-dessus de la formation professionnelle continue, dont le rôle est justement d’élever les qualifications, de permettre des reconversions professionnelles, d’enrichir les savoir-faire individuels et collectifs.
Les dernières « réformes » ont déjà permis au patronat d’égratigner le droit à la formation, notamment en ce qui concerne son financement et la liberté de choix des salariés. La formation professionnelle doit être au service des intérêts des salariés et non de ceux du patronat ! D’où l’urgence pour les syndicats et les travailleurs de se réapproprier ce droit.
Pour quoi faire ?
Les syndicats ont tout à gagner à se préoccuper de la formation professionnelle dans l’entreprise. C’est une opportunité intéressante pour discuter avec les salariés et les jeunes alternants sur la valorisation de leurs connaissances et compétences, sur l’acquisition d’un diplôme, titre ou certification professionnelle, sur l’amélioration de leur insertion professionnelle, sur la reconnaissance par leurs pairs et/ou leur évolution professionnelle.
Porter un projet personnel, changer de métier, être mieux payé sont autant de sujets qui peuvent être abordés. Le fruit de ces discussions permet ensuite de préparer le plan de formation de l’entreprise avant sa présentation au comité d’entreprise. Il n’y a pas de raisons que la direction décide de tout sans tenir compte des besoins des salariés portés par les représentants du personnel !
Il est important pour les syndicats d’adopter une position conquérante pour gagner, dans les entreprises, les branches et les territoires, des avancées qui renforcent les moyens pour les salariés de choisir librement leurs trajectoires professionnelles. Lorsqu’ils sont mobilisés avec détermination, dans le cadre d’une démarche individuelle et/ou collective, les dispositifs et droits à la disposition de chaque salarié ouvrent la possibilité de :
– construire son projet d’évolution professionnelle et faire reconnaître ses qualifications avec l’entretien professionnel, le bilan de compétences, le passeport de formation-orientation et la validation des acquis de l’expérience (VAE) ;
– réaliser un projet personnel avec le congé individuel de formation (CIF) ;
– obtenir une formation dans le cadre du plan de formation ou d’une période de professionnalisation ;
– revendiquer, négocier une formation en utilisant son compte personnel de formation (CPF) pour la financer en tout ou partie.
Les principaux dispositifs de formation
– L’entretien professionnel est encadré par l’article L. 6 315-1 du code du travail. Il doit avoir lieu tous les deux ans et porte sur les perspectives d’évolution professionnelle, notamment en termes de qualifications et d’emploi. Il est formalisé par un document dont une copie est remise au salarié. Cet entretien ne porte pas sur l’évaluation du travail du salarié.
Tous les six ans de présence continue du salarié, l’employeur doit faire un état des lieux récapitulatif de son parcours professionnel, pour vérifier s’il a bénéficié des entretiens professionnels et pour apprécier s’il a suivi au moins une action de formation, bénéficié d’une progression salariale ou professionnelle et acquis des éléments de certification, par la formation ou par une validation des acquis de l’expérience.
– Le conseil en évolution professionnelle (CEP) est un droit ouvert à tous, salariés ou non, actifs ou privés d’emploi. Il est défini par
l’article L. 6 111-6 du code du travail. Il est assuré par Pôle Emploi, l’APEC, les OPACIF, les missions locales, CAP Emploi ou encore par certains opérateurs régionaux. C’est un temps d’écoute, d’information et de conseil, se déroulant hors de l’entreprise, en toute confidentialité, y compris sur le temps de travail.
Chaque individu de plus de 16 ans est titulaire, depuis le 1er janvier 2015, d’un compte personnel de formation (CPF), jusqu’à son
entrée en retraite. Il cumule des heures (24 par an, en plus de celles acquises au titre du DIF, dans la limite de 150 heures) destinées à financer des actions de formation. Le tout est accessible depuis le site internet www.moncompteformation.gouv.fr.
Pour les salariés, il est utilisable sans autorisation de l’employeur pour les formations hors temps de travail et celles, sur le temps de travail, permettant d’acquérir le socle de compétences, financées au titre de l’abondement correctif (entretien professionnel), les actions d’accompagnement à la VAE, décidées par accord de branche ou d’entreprise.
Pour les privés d’emploi, il est utilisable sans autorisation de Pôle Emploi, uniquement pour les actions n’excédant pas le nombre d’heures acquises en tant que salarié.
– Le contrat de professionnalisation est un contrat de travail conclu entre un employeur et un salarié permettant l’acquisition d’une qualification professionnelle (diplôme, titre, CQP…) reconnue par l’État et/ou la branche professionnelle. Son objectif est de faciliter l’insertion ou le retour à l’emploi des jeunes et des adultes. Attention, depuis peu, les certifications inscrites à l’Inventaire catégorie A et B (c’est-à-dire les certifications réglementaires et les certifications marchandes) sont éligibles au contrat de professionnalisation. La CGT encourage les salariés à mobiliser ce dispositif pour acquérir une certification inscrite au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP), seule garantie d’obtenir un diplôme, un titre ou une certification professionnelle reconnue par la branche et positionnée sur notre grille de classifications.
– La période de professionnalisation (PDP) est un dispositif ayant pour objectif de « permettre à certains salariés en CDI ou contrat d’insertion rencontrant des difficultés professionnelles d’acquérir par voie d’alternance une qualification reconnue en vue de favoriser leur maintien dans l’emploi. » Les formations éligibles, d’une durée minimale de 70 heures, sont les mêmes que pour le CPF (certifications inscrites au RNCP ou à l’Inventaire) ainsi que les qualifications reconnues par les conventions collectives.
Le contrat d’apprentissage est un contrat de travail conclu entre un employeur et un salarié permettant à un jeune de suivre une formation générale, théorique et pratique, en vue d’acquérir un diplôme d’État ou un titre à finalité professionnelle inscrit au RNCP, dont les titres relevant du ministère du Travail. Il repose sur le principe de l’alternance entre enseignement théorique en établissement de formation et enseignement du métier chez l’employeur. Si le contrat est conclue à durée indéterminée, il débute par une période d’apprentissage d’une durée équivalente à la formation suivie. À l’issue de la formation, le salarié conserve le bénéfice du CDI.
– Le Congé Individuel de Formation (CIF) permet au salarié d’accéder à une formation de son choix, même si elle ne correspond pas à son emploi actuel ou à l’activité de son entreprise. Il donne la possibilité de suivre une formation de longue durée (jusqu’à un an ou 1 200 heures), pendant le temps de travail, tout en conservant son salaire et la garantie de retrouver son poste. Il est possible de réaliser un projet personnel afin d’acquérir un niveau supérieur de qualification, de changer d’activité ou de profession, de s’ouvrir plus largement à la culture, à la vie sociale et à l’exercice des responsabilités associatives bénévoles.
En plus du salaire, les frais de formation ainsi que les frais de transport et d’hébergement peuvent être pris en charge. Le CIF est mis en œuvre à la seule initiative du salarié, l’employeur n’ayant pas de droit de regard sur le choix et le contenu de l’action de formation. Le salarié doit toutefois obtenir une autorisation d’absence, qui peut être reportée par l’employeur seulement dans des cas précis et obtenir l’accord de prise en charge de l’organisme gestionnaire du CIF (Fongecif ou Opacif) qui rembourse le salaire à l’entreprise et paye l’organisme de formation. Plus de renseignements sur : www.moncepmonfongecif.fr/
Notre projet CGT
Le collectif fédéral « Formation professionnelle » travaille actuellement à la mise à jour d’un guide pratique qui, sans avoir la vocation à tout détailler, vise à permettre à chacun de comprendre le fonctionnement de la formation professionnelle.
Le collectif aide également les syndicats à se réapproprier cet outil, en prévoyant notamment de se rendre en régions pour discuter des enjeux de la formation professionnelle. Actuellement, il apporte son concours aux syndicats du port de Marseille pour la création d’une école des métiers de la mer à même de satisfaire les besoins des salariés et privés d’emploi.
Il est essentiel que l’enjeu de la formation professionnelle intègre pleinement notre démarche revendicative, en suivant le continuum revendicatif suivant : Orienter – Former – Certifier – Insérer – Reconnaître.
La CGT propose un nouveau statut du travail salarié, garantissant à chacune et à chacun des droits individuels garantis collectivement et leur transférabilité. Et ce pour permettre à chaque salarié, de la sortie du système scolaire à la fin de sa carrière professionnelle, de disposer d’un certain nombre de droits cumulatifs et progressifs, transférables d’une entreprise à l’autre, opposables à tout employeur.
Ces droits sont entre autres :
– le droit au travail, à un contrat à durée indéterminée à temps complet, à la formation continue, à l’accès à la certification, à la sécurité sociale professionnelle ;
– le droit à une progressivité de carrière qui lie qualification initiale, ancienneté, acquisition de nouvelles qualifications et évolution de salaire tout au long de la vie professionnelle. Pour la CGT tout salarié devrait avoir au moins doublé (à valeur constante), à l’âge de la retraite, son salaire d’entrée dans la vie professionnelle ;
– le droit à la formation continue (générale et professionnelle), accessible à tous, sur le temps de travail et rémunérée comme telle. Cela passe par un droit élargi à la formation professionnelle débouchant sur l’évolution régulière de sa qualification et sa reconnaissance permanente.
Dans l’entreprise, 10 % des heures travaillées collectivement devraient être consacrées à la formation sur le temps de travail. Ce qui correspond environ à un mois de formation chaque année ou à une année de formation tous les dix ans pour chaque salarié. C’est ambitieux ! Mais c’est nécessaire !