Très tôt, le syndicalisme s’est préoccupé de l’organisation du travail et de ses conséquences sur la santé des travailleurs et de la population, à l’image de la lutte des ouvriers peintres contre l’usage du blanc de céruse en 1905-1906. Il n’est donc pas étonnant que son histoire croise régulièrement celle du handicap, qu’il soit inné ou acquis.
Ce terme, « handicap », ne se définit toutefois pas aisément. La définition populaire véhicule l’idée dépréciative d’une déficience, d’une incapacité ou d’une déviation par rapport à une norme générale. Mais, celle-ci masque le fait que le handicap est également une construction social, fruit du regard de la société et de son environnement économique. Le régime capitaliste, fondé sur la mise en concurrence des individus pour extorquer un profit maximal, créé en effet les conditions pour mettre de côté celles et ceux dont la productivité est jugée insuffisante.
Seules les luttes ont permis d’imposer la reconnaissance sociale et juridique du handicap, ouvrant la voie à l’indemnisation, à l’accompagnement médical, à la réadaptation ou au reclassement professionnel, à l’adaptation de l’outil de travail ou encore un droit au logement, aux transports, aux loisirs et à la culture.
Ces victoires ne sont pas l’apanage du syndicalisme, mais celui-ci n’y est pas totalement étranger, comme en témoigne cette contribution qui entend brosser quelques jalons d’une histoire de l’attitude et des actions de la CGT en faveur des hommes et des femmes touchés par un handicap.
La CGT cantonna longtemps son activité au champ du travail, en se préoccupant avant tout d’obtenir la prise en charge des salariés victimes d’accidents du travail ou de maladies professionnelles. Après la Seconde Guerre mondiale, la mise en œuvre de la Sécurité sociale et l’élargissement des bénéfices du régime du handicap pour les militaires à celui pour les civils, incitèrent la CGT à revendiquer l’adaptation de l’outil de travail au salariat et le développement de la rééducation professionnelle. Une dernière étape intervient après les grèves de mai-juin 1968. La CGT exige la généralisation de la prévention en matière d’hygiène, de sécurité et de condition de travail, tandis qu’elle élargit son répertoire revendicatif, pour véritablement aborder les questions de logement, de transports, de loisirs et de culture des personnes handicapées.
Un acte fondateur. La loi du 9 avril 1898
L’adoption, après plusieurs années de débats, le 9 avril 1898, de la loi sur la réparation des accidents du travail constitue un acte fondateur. Véritable révolution juridique, celle-ci renverse la charge de la preuve au profit du travailleur, impose un régime assuranciel au patronat pour l’indemnisation et ouvre la voie à la prévention en matière d’hygiène et de sécurité.
L’adoption de cette loi doit plus à l’intervention des milieux réformistes qu’à l’action syndicale proprement dite mais, avec près de 30 000 morts et plusieurs centaines de milliers d’accidentés au travail rien que pour la période 1899-1912, l’enjeu est de taille et le syndicalisme entend informer sur les bénéfices de cette nouvelle législation.
L’ambiguïté de certaines dispositions, le poids des faits dans le contentieux ou encore la méconnaissance de l’institution judiciaire imposent en effet la prise en charge des travailleurs par des conseils juridiques et des cliniques sous contrôle syndical, pour combattre la partialité des experts nommés par les compagnies d’assurances privées.
L’ambition affichée dans les congrès se heurte toutefois à la réalité du terrain. Seule une poignée de bourses du travail parviennent à établir un conseil juridique, tandis que la clinique se résume trop souvent au seul dévouement d’un médecin acquis à la cause ouvrière.
Le manque de moyens, humains et financiers, ou encore la priorité donnée à d’autres revendications peuvent expliquer ce manque d’implication militante. Une tentative pour rompre ce désintérêt est tentée par la confédération en octobre 1913, avec l’organisation à Paris de la première conférence nationale des accidents du travail.
Mais, faute de temps, les mesures envisagées ne purent se traduire dans les quelques mois qui nous sépare alors de la Grande Guerre.
Le tournant de la Grande Guerre (1914-1919)
Il faut attendre la Première Guerre mondiale pour voir émerger une nouvelle approche culturelle et sociale du handicap. Il faut dire que parmi les 3,6 millions de soldats français blessés lors du conflit, plus d’un million sont reconnus comme invalides permanents, 56 000 ont été amputés et 10 à 15 000 sont de grands blessés du visage, des « gueules cassées ». Il ne faut pas non plus méconnaître les dizaines de milliers de soldats victimes de séquelles psychologiques, pour lesquels la vie familiale et professionnelle ne fut plus jamais la même.
Sans attendre la fin du conflit, un cadre juridique est bâti pour ces mutilés de guerre, en octroyant une place importante aux notions de réadaptation et de reclassement, en raison de la pénurie de main-d’œuvre sur le marché du travail. Il s’agit notamment de la loi du 2 janvier 1918 instituant l’Office national des mutilés et réformés de guerre qui supervisa jusqu’à 350 écoles de rééducation professionnelle, et de la loi du 31 mars 1919 instituant le droit à réparation pour les militaires affectés d’infirmités dues à la guerre, en leur accordant une pension fixée en fonction d’un taux d’invalidité. Ce régime, conçu pour les militaires, ne fut déployé qu’à partir des années trente en direction des accidentés du travail.
Les grandes vagues de grèves qui déferlent en France à partir du printemps 1917 contraignent l’État à « lâcher du lest », notamment en transposant le régime de la loi de 1898 aux maladies professionnelles, par l’adoption de la loi du 25 octobre 1919. Initialement restreinte aux seuls cas de saturnisme et d’hydrargyrisme, cette loi fut progressivement étendue grâce à l’action syndicale et politique.
Des rivalités entre organisations (1921-1936)
Le congrès de Tours, en 1920, acte la scission entre parti socialiste et parti communiste sur la base d’un profond désaccord sur la portée de la révolution russe de 1917 et sur les potentialités politiques de la période. Un an plus tard, la minorité révolutionnaire, exclue de la CGT, fonde sa propre organisation, la CGT-Unitaire.
Ces deux organisations poursuivent leur campagne pour l’amélioration du régime des lois de 1898 et 1919, en mobilisant notamment le canal parlementaire.
La CGT multiplie les pressions exercées auprès du Parlement, informe par voie de presse, d’affiches et de tracts, organise des réunions publiques ou encore dépose des amendements et des propositions de lois avec le soutien des élus socialistes.
Elle consolide, notamment sur le plan de l’expertise juridique, la création de la Fédération Nationale des Mutilés et Invalides du Travail (FNMIT) en novembre 1920, future Fédération Nationale des Accidentés du Travail et des Handicapés (FNATH).
En 1924, la CGT entame une réflexion d’ensemble sur la législation relative aux accidents du travail. Un imposant rapport, publié dans La Voix du Peuple, est soumis aux parlementaires en juillet, un mois après la proposition de loi déposée par la CGTU.
La prise en compte des propositions de la CGT dans le projet de loi déposé par le ministre du Travail en 1925 se révélant insuffisante, le Droit ouvrier enfonce le clou en publiant un second rapport, tandis que l’Organisation Internationale du Travail acceptait, sur proposition de la Fédération Syndicale Internationale et de la CGT, de se pencher sur cette question.
En dépit de leurs limites, les lois sur les assurances sociales de 1928 et 1930 (soutenues par la CGT majoritaire et dénoncées par la CGT unitaire) constituent un premier progrès pour les accidentés du travail ; elles constituent un jalon dans la préparation de la Sécurité sociale.
Les démarches engagées, tant par la CGT que par la CGTU, n’aboutissent pas et alimentent un peu plus encore la désunion entre les deux organisations, d’autant plus que la FNMIT refuse l’accord de rapprochement proposée par la CGT en 1925. En formulant des revendications sur les maladies professionnelles et sur l’inspection du travail, la FNMIT affirme au contraire son indépendance, d’autant plus facilement que la croissance de ses effectifs est rapide, de deux mille adhérents au début des années 1920 à près d’un million en 1940.
Il ne faut toutefois pas sous-estimer l’importance du travail d’information et de défense fourni quotidiennement par la CGT et la CGTU. Ainsi, le conseil juridique de la Bourse du Travail de Paris répond en moyenne à 15 000 sollicitations chaque année, entre 1918 et 1933, dont une part non négligeable concerne les accidents du travail et les maladies professionnelles.
Deux expériences inédites (1937-1939)
La réunification du mouvement syndical, lors du congrès de Toulouse en mars 1936, est suivie par une vague impressionnante de 2,4 millions de grévistes. Cette dernière se traduit en adhésions : la CGT réunifiée passe de 785 000 adhérents en 1935 à plus de quatre millions en 1937.
Ses moyens humains et financiers décuplés, elle impulse la création d’une structure inédite, placée sous la responsabilité de Benoît Frachon : l’Institut confédéral d’étude et de prévention des maladies professionnelles. Mis en place en novembre 1937 et dirigé par le Docteur Guy Hausser, il comprend un secrétariat, une salle d’examen, un laboratoire, une bibliothèque, une équipe médicale et publie sa propre revue, Les Archives des maladies professionnelles et de toxicologie industrielle, toujours publiée de nos jours, quoiqu’ayant perdue son affiliation à la CGT.
Après examens des travailleurs et des enquêtes de terrain, cet institut constitue des dossiers sur lesquels les militants syndicaux s’appuient pour obtenir une amélioration des conditions d’hygiène et de travail. Il diligente plusieurs investigations chez les fossoyeurs et les égoutiers, sur le benzol, la soudure à l’arc, l’acétone, le saturnisme, l’héliogravure, la photogravure, la chaudronnerie. Les résultats obtenus permettent à la CGT de dresser un état des lieux de la condition sanitaire de la main-d’œuvre dans certaines branches professionnelles et d’exiger la mise en œuvre de mesures concrètes.
Le déclenchement de la guerre mit cependant un terme précoce à cette expérience tout à fait originale dans l’histoire du mouvement syndical.
Durant cette même période, la Fédération CGT de la métallurgie est devenue la première organisation de la CGT, avec près de 850 000 adhérents en 1938 contre 46 000 trois ans plus tôt. Le taux de syndicalisation dans la branche est désormais de 72 %, contre 3,9 % auparavant !
Parmi les nombreuses réalisations sociales mises sur pied, il faut mentionner l’inauguration, en novembre 1938, par l’union des syndicats CGT des métaux de la Seine, via son association l’Union fraternelle des métallurgistes, d’une vaste polyclinique rue des Bluets à Paris (XIe arr.). Celle-ci comprend notamment un service de consultations médicales ouvert aux salariés victimes d’accidents du travail, qui repris son activité après l’interruption de la Seconde Guerre mondiale.
Il faut enfin mentionner la création en août 1936, par des militants de la CGT, de l’Union nationale des tuberculeux civils (UNTC), devenue en 1964 l’Association nationale de défense des malades, invalides et handicapés (AMI), qui envisage son action comme le prolongement de l’action syndicale.
Un nouveau départ (1945-1968)
L’adoption des ordonnances du 4 et 19 octobre 1945 portant création de la sécurité sociale permet l’intégration dans le régime général de la branche accidents du travail et maladies professionnelles, ainsi que l’extension du droit à la rééducation fonctionnelle et professionnelle.
La mise sur pied de structures du travail protégé, les centres d’aide par le travail (CAT) à partir de 1954, est renforcée par la loi du 23 novembre 1957 qui accorde notamment à tout travailleur handicapé le droit à une réadaptation et à une rééducation professionnelle adaptée, avec la prise en charge des frais de séjour et de la rémunération, soit par l’État, soit par un organisme de la Sécurité sociale.
Elle impose à toutes les entreprises des secteurs publics et privés une obligation d’embauche des handicapés par priorité sur un certain nombre d’emplois et leur assure une protection particulière : réglementation des salaires et des abattements, allongement de la durée du préavis de licenciement, etc.
Elle met en place, en plus des CAT, deux nouveaux types d’établissements : les ateliers de travail protégé et les centres de distribution de travail à domicile.
L’Union des syndicats CGT de la métallurgie de la région parisienne, en accord avec sa Fédération, négocie la création d’un centre de rééducation professionnelle avec la caisse régionale de sécurité sociale. Celle-ci aboutit à l’inauguration en avril 1951 dans le douzième arrondissement de Paris du centre Suzanne Masson, du nom d’une dessinatrice en bureau d’étude, exécutée en 1943 en Allemagne pour ses convictions syndicales et politiques. Parmi les formations proposées, on recense celles de tourneur, de dépanneur en matériel électronique ou encore de dactylo, avec la particularité d’assurer un suivi médical et social, en plus de la formation technique.
Au niveau confédéral, les résolutions adoptées dans les congrès, relative à la sécurité sociale, avancent systématiquement des revendications sur les accidents du travail, les maladies professionnelles ou l’invalidité. La réparation intégrale du préjudice subi à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle est défendue, tout comme la création de nouveaux centres de rééducation et de reclassement professionnel et la revalorisation des rentes d’incapacité. L’accent est également porté sur le développement de la prévention et de la protection des travailleurs sur les lieux de travail, notamment par l’extension à toutes les entreprises de comité d’hygiène et de sécurité mis sur pied par un décret d’août 1947, concomitamment à la création de la médecine du travail.
L’approfondissement de la démarche (des années 1970 à nos jours)
De manière générale, on observe un regain d’intérêt pour les questions de santé au travail après les grèves de mai-juin 1968. Parmi les étapes importantes, il faut mentionner l’abaissement du seuil de création des comités d’hygiène et de sécurité par la loi de 1973, la création de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail la même année, l’adoption de la loi du 30 juin 1975 d’orientation en faveur des personnes handicapées ou encore la déclaration des droit des personnes handicapées adoptée par l’ONU le 9 décembre 1975.
Dans ce contexte, le 40e congrès confédéral, organisé à Grenoble en 1978, avance une série de revendications spécifiques et prend l’engagement de développer la réflexion et les propositions de la CGT en matière de handicap.
Dans la foulée, des journées d’études confédérales sont mises sur pied – la Rencontre nationale des handicapés du 11 décembre 1981 par exemple –, la CGT participe au grand colloque organisé par le ministère du Travail en janvier 1982, tandis que les luttes des personnels et des handicapés dans les établissements sont soutenues. Cette relance se poursuit dans les années qui suivent, notamment par le canal de rencontres, comme celle pour l’amélioration des conditions de travail et la promotion de la santé à Pantin en novembre 1986, ou la rencontre internationale des infirmières et infirmiers à Bobigny en mars 1988.
Les années soixante-dix et quatre-vingt sont aussi celles des luttes et des campagnes de soutien pour obtenir la réintégration de salariés licenciés en raison de leur handicap ou de leurs maladies, à l’image de Sylvie Plessis, Joëlle Soyer, Pascal Cohas, Françoise Paris ou celles des RVI-Vénissieux, pour ne prendre que ces quelques exemples. Ce combat se prolonge, avec des associations et des organisations non gouvernementales, dans les décennies qui suivent, à l’image de la lutte pour la défense des victimes de l’amiante ou encore de celle pour l’interdiction de l’usage des éthers de glycol les plus toxiques dans l’industrie.
L’expérience acquise par les comités d’entreprise et organismes assimilés en matière de loisirs et de vacances est essentielle, tout comme celle des métallos parisiens en matière de rééducation professionnelle.
En effet, ces derniers ont obtenus des autorités de tutelle l’agrandissement du centre Suzanne Masson et l’ouverture de deux nouvelles structures : le centre Jean-Pierre Timbaud à Montreuil (1984) et le centre Louis Gatignon à Vouzeron (1985). Ces victoires ne purent être obtenues qu’avec le rapport de forces construit par le mouvement syndical, les salariés des structures et les stagiaires, avec le coup de pouce décisif des ministres communistes du gouvernement de gauche issu du scrutin du 10 mai 1981 : manifestations, pétitions, organisation sauvage d’un cours sur le parvis de la Bourse en 1983, occupation du secrétariat d’État aux handicapés en 1986. Grâce à cela, des milliers de stagiaires ont pu bénéficier d’une formation de qualité et d’un accompagnement individualisé.
La reconnaissance institutionnelle
A partir des années cinquante, la reconnaissance institutionnelle du handicap entraîne la création d’institutions au sein desquelles interviennent des militants de la CGT.
Tel est le cas dans les commissions départementales d’orientation des infirmes (CDOI), créées par le décret du 29 novembre 1953 et chargées de donner un avis sur l’aptitude au travail ou la possibilité d’une rééducation professionnelle. Celles-ci sont remplacées par les Commissions techniques d’orientation et de reclassement professionnel (COTOREP) par la loi du 30 juin 1975. Ces dernières disparaissent avec la loi du 11 février 2005 au profit des Commissions des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH).
Tel est aussi le cas pour le Conseil supérieur pour le reclassement professionnel et social des travailleurs handicapés, mis en place par la loi du 23 novembre 1957. Cette instance consultative, placée auprès du Ministre chargé du Travail, donne son avis sur les actes législatifs et réglementaires concernant la rééducation professionnelle, le placement des travailleurs handicapés et le travail protégé.
Il ne faut pas non plus omettre les militants CGT désignés comme assesseurs dans les « commissions régionales », devenues les tribunaux du contentieux de l’incapacité par la loi du 18 janvier 1994. Ces juridictions sont notamment chargées de juger l’état ou les taux d’invalidité ou d’incapacité de travail liée aux accidents du travail et aux maladies professionnelles ou encore de désigner des établissements de rééducation, de reclassement, d’accueil des adultes handicapés ou de placement en atelier protégé ou en centre d’aide par le travail.
Dernier exemple enfin, la loi du 10 juillet 1987, prévoit pour les entreprises privées de plus de 20 salariés ne respectant pas le quota de 6 % de salariés handicapés, le versement d’une contribution à l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (AGEFIPH), organisme paritaire administré par des représentants du patronat, des salariés et des associations. Depuis, la CGT, en tant qu’organisation syndicale représentative, y siège et organise, au travers notamment du collectif Travail et Handicap de la CGT métallurgie d’Ile-de-France, des actions de sensibilisation des militants sur le handicap au travail, au travers de visites d’entreprise, de journées d’études ou encore de stages.
En conclusion
Ces modestes jalons dans l’histoire de l’attitude et des actions de la CGT en direction des femmes et des hommes touchés par un handicap mériteraient sans aucun doute d’être complétés, affermis par des recherches plus méthodiques dans les fonds d’archives du secteur « social » de la confédération ou dans ceux de la Fédération « Action et santé sociale ». Plusieurs pistes complémentaires mériteraient également d’être suivies : exemples de luttes menées dans les entreprises, avec l’aide des comités d’entreprise et des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, rôle et investissement des militants CGT dans les institutions du handicap.
Malgré tout, il faut noter que la CGT et ses organisations ont, dès les premières années de leur existence, lutté pour défendre et améliorer les conditions de travail et de vie des travailleurs et de leurs familles. Cette action quotidienne de longue haleine a permis d’obtenir et de préserver des droits collectifs et individuels pour les personnes handicapées, au travail comme dans leur vie. Les militants de la CGT ont également joué un rôle important dans la création et le fonctionnement de plusieurs associations, comme la FNATH, l’AMI ou plus récemment l’ANDEVA.
En outre, la CGT – et sa Fédération de la métallurgie en particulier – ont été à l’origine de plusieurs initiatives originales, comme l’Institut confédéral d’étude et de prévention des maladies professionnelles ou encore les trois centres de rééducation professionnelle gérés par les métallos parisiens.
Cette histoire doit se conjuguer au présent car, dans un contexte d’austérité et de privatisation appliquée à la santé, il est plus que jamais nécessaire de revendiquer et de lutter pour préserver et renforcer les droits des personnes atteintes d’un handicap.
Actes de la recherche en sciences sociales, 2006/3 (no 163), dossier « Santé et travail. Déni, visibilité, mesure », 144 pages. En ligne : https://www.cairn.info/revue-actes-de-la-recherche-en-sciences-sociales-2006-3.htm.
Revue d’histoire moderne et contemporaine, 2009/1 (n° 56-1), dossier « Les maladies professionnelles : genèse d’une question sociale (XIXe-XXe s.) », 256 pages. En ligne : https://www.cairn.info/revue-d-histoire-moderne-et-contemporaine-2009-1.htm.
Pierre Bance, Les fondateurs de la CGT à l’épreuve du droit (1876-1902), Claix, La pensée sauvage, 1978, 251 pages.
Anne-Sophie Bruno, Eric Geerkens, Nicolas Hatzfeld, Catherine Omnès, La santé au travail entre savoirs et pouvoirs (XIXe-XXe siècles), Rennes, PUR, 2011, 308 pages.
Alexandre Courban, Solidarité ! Le livre-dvd retraçant l’histoire de l’Union fraternelle des métallurgistes, Paris, UFM, 2015, 259 pages.
Jean-Claude Cunin, Le Handicap en France : chronique d’un combat politique, Paris, Dunod, 2008, 236 pages.
Damien de Blic, « De la Fédération des mutilés du travail à la Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés. Une longue mobilisation pour une « juste et légitime réparation » des accidents du travail et des maladies professionnelles», Revue française des affaires sociales, 2008, n° 2-3, p. 119-140. En ligne : www.cairn.info/revue-francaise-des-affaires-sociales-2008-2-page-119.htm.
Stéphane Buzzi, Jean-Claude Devinck, Paul-André Rosental, La santé au travail 1880-2006, Paris, La Découverte, 2006, 124 pages.
Alain Cottereau, Le Mouvement social, numéro spécial « L’usure au travail », n° 124, juillet-septembre 1983, 194 pages.
Marc-Olivier Déplaude, « Codifier les maladies professionnelles : les usages conflictuels de l’expertise médicale », Revue française de science politique, 5/2003 (Vol. 53), pp. 707-735.
Pascal Doriguzzi, L’histoire politique du handicap : de l’infirme au travailleur handicapé, Paris, L’Harmattan, 1994, 223 pages.
Pascal Doriguzzi, « Histoire des travailleurs handicapés face à l’emploi et aux intérêts patronaux », Lien social, n° 119, 1991, pp. 5-8.
Pascal Doriguzzi, Cyrille Megdiche, « Histoire du concept de travailleur handicapé », Lien social, n° 118, 1991, pp. 5-8.
Nicolas Hatzfeld, « L’émergence des troubles musculo-squelettiques (1982-1996) », Histoire & mesure, XXI – 1 | 2006. En ligne : http://histoiremesure.revues.org/1538.
Rémi Lenoir, « La notion d’accident du travail : un enjeu de luttes », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 32-33, 1980, pp. 77-88. En ligne : http://www.persee.fr/doc/arss_0335-5322_1980_num_32_1_2081.
Catherine Omnès, « Loi sur la réparation : quarante ans de contestation », Santé & Travail, juillet 2009, n° 67. En ligne : http://www.alternatives-economiques.fr/page.php?controller=article&action=htmlimpression&id_article=43673&id_parution=853.
Catherine Omnès, Laure Pitti, Cultures du risque au travail et pratiques de prévention, Rennes, PUR, 2008, 264 pages.
Florence Patterson, Michel Chauvière, Catherine Barral, Henri-Jacques Stiker, L’Institution du handicap. Le rôle des associations, XIXe-XXe siècles, Rennes, PUR, 2000, 415 pages.
Michel Pigenet, « Services syndicaux : ambitions et réalisations en France avant 1914 », Collectif, mai 1994, pp. 22-24.
Michel Pigenet, « Prestations et services dans le mouvement syndical français (1860-1914). Aux origines d’une « lacune » », Cahiers de l’IRM, n° 51, 1993, pp. 7-28.
Morgan Poggioli, « L’institut d’étude et de prévention des maladies professionnelles de la CGT (1937-1939) », Sociologie Santé, n° 24, juin 2006, pp. 242-253.
Madeleine Rebérioux, « Mouvement syndical et santé en France, 1880-1914 », in Parcours engagés dans la France contemporaine, Paris, Belin, 1999, pp. 261-284.
Pierre Rebischong, Le Handicap, Paris, PUF, coll. Que sais-je ?, 2015, 128 pages.
Henri-Jacques Stiker, Corps infirmes et sociétés. Essai d’anthropologie historique, Paris, Dunod, 2013, 330 pages.
Site internet du collectif handicap intégration Gouesnou (chronologie de la législation française en matière de handicap) : http://asso.chig.free.fr/
ALTER, société européenne de recherche sur le handicap : http://alter-asso.org/
La MSSH, la Maison des sciences sociales du handicap : http://mssh.ehesp.fr/
8 avril 1898 Loi sur les accidents du travail, instituant le principe de responsabilité sans faute de l’employeur, fondée sur le risque professionnel et limitant cette responsabilité qui est forfaitaire. L’extension aux différentes professions est progressive jusqu’en 1923.
14 juillet 1905 Loi relative à l’assistance aux vieillards infirmes et incurables qui prévoit pour seule assistance la prise en charge de l’hébergement.
17 avril 1916 Loi, complétée par celle du 31 janvier 1923, accordant aux militaires et aux marins, réformés ou retraités par suite de blessures ou d’infirmités contractées durant la guerre, un droit de préférence pour l’obtention d’emplois réservés dans les administrations.
2 janvier 1918 Loi instituant l’Office national des mutilés et réformés de guerre pour subventionner les écoles de rééducation.
31 mars 1919 Loi instituant le droit à réparation pour les militaires affectés d’infirmités dues à la guerre, en leur accordant une pension fixée en fonction d’un taux d’invalidité.
1921 Naissance de la Fédération des mutilés du travail (FNMT), devenue en 1985 la Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés (FNATH).
26 avril 1924 Loi relative à l’emploi obligatoire des militaires percevant une pension d’invalidité. Elle impose, pour la première fois aux entreprises privées de plus de dix salariés, une obligation d’employer une catégorie de travailleurs.
1925 Naissance de la Fédération pour l’Insertion des personnes sourdes et des personnes Aveugles de France (FISAF).
5 avril 1928 Loi permettant aux salariés ayant un contrat de travail de bénéficier d’une assurance maladie, maternité, invalidité, vieillesse et décès.
8 juin 1929 Naissance de la Ligue pour l’adaptation des diminués physiques du travail – LADAPT.
14 mai 1930 Loi instituant le droit pour les victimes d’accident du travail et aux mutilés du travail d’être admis gratuitement dans les écoles de rééducation professionnelle créées pour les militaires.
1933 Naissance de l’Association des paralysés de France (APF).
1936 Naissance de l’Union nationale des Tuberculeux Civils (UNTC), devenue la Fédération Unifiée des Malades et Anciens Malades des Sanatorium (FNT) en 1937, puis la Fédération nationale des tuberculeux civils (FNTC) en 1938. En 1948, elle adopte le nom de Fédération nationale de lutte antituberculeuse (FNLA), pour finalement s’intituler l’Association nationale de défense des Malades invalides & infirmes (AMI) à partir de 1965.
3 juillet 1945 Ordonnance organisant la protection sociale des aveugles et prévoit leur placement dans des établissements de formation professionnelle.
2 août 1945 Loi Cordonnier généralisant l’aide à la réinsertion à tous les grands infirmes. Elle leur alloue une pension et leur permet d’accéder à la formation professionnelle.
4 et 19 octobre 1945 Ordonnances de création de la sécurité sociale intégrant la branche accidents du travail et maladies professionnelles au régime général et permettant le développement de la rééducation fonctionnelle et professionnelle.
2 août 1949 Assistance à certaines catégories d’aveugles et de grands infirmes, par la délivrance de la carte d’invalidité
23 septembre 1953 Ouverture des services publics de réadaptation fonctionnelle
29 novembre 1953 Décret créant les commissions départementales d’orientation des infirmes (CDOI) chargées de donner un avis sur l’aptitude au travail ou la possibilité d’une rééducation professionnelle.
1954 Création des centres d’aide par le travail par une autorisation ministérielle.
20 mai 1955 Décret modifiant la loi du 26 avril 1924 en étendant le bénéfice des dispositions qui assurent l’emploi obligatoire des mutilés de guerre aux diminués physiques, reconnus comme tels par les commissions départementales d’orientation des infirmes (CDOI).
1957 Naissance de l’Association D’entraide des Polios et handicapés (ADEPP).
23 novembre 1957 Loi instituant, pour la première fois, l’objectif de la mise en place d’un système cohérent de reclassement professionnel des handicapés. Dans le texte, le changement des termes témoigne de l’évolution sociale et culturelle : d’infirmes ou mutilés, on passe aux expressions « handicapés » et « travailleurs handicapés ».
Cette loi concerne « toute personne dont les possibilités d’acquérir ou de conserver un emploi sont effectivement réduites par suite d’insuffisance ou d’une diminution de ses capacités physiques ou mentales ».
Elle étend à tous les handicapés la compétence de la commission départementale d’orientation des infirmes
Elle accorde à tout travailleur handicapé le droit à une réadaptation et à une rééducation professionnelle adaptée avec prise en charge des frais de séjour et de la rémunération, soit par l’Etat, soit par un organisme de la Sécurité sociale.
Elle impose à toutes les entreprises des secteurs publics et privés une obligation d’embauche des handicapés par priorité sur un certain nombre d’emplois et leur assure une protection particulière : réglementation des salaires et des abattements, allongement de la durée du préavis de licenciement, etc.
Elle renforce les structures du travail protégé en mettant en place, en plus des CAT, deux nouveaux types d’établissements : les ateliers de travail protégé et les centres de distribution de travail à domicile.
1958 Naissance de l’Association Française contre les Myopathies (AFM).
1960 Naissance de l’Union Nationale des Parents d’Enfants Inadaptés (UNAPEI).
3 janvier 1968 Loi traitant des mesures spécifiques de protection judiciaire pour les personnes majeures qui, en raison notamment de leur handicap, nécessitent que soit prononcée à leur égard une mesure de protection ou d’accompagnement spécifique.
1970 Financement des aménagements de poste par l’Etat.
1971 Naissance du Groupement pour une information progressiste des aveugles et amblyopes (GIPAA).
13 juillet 1971 Création de l’Allocation pour Adultes Handicapés (AAH).
30 juin 1975 Loi affirmant et garantissant les droits fondamentaux des personnes handicapées. Elle recouvre les handicaps de toute nature (moteur, sensoriel, mental) et de toute origine (congénitale, accidentelle, pathologique). Cette loi a pour ambition d’intervenir à tous les moments de la vie du handicapé : prévention, orientation, rééducation, emploi, compensation. Elle met en place les Commissions techniques d’orientation et de reclassement professionnel (COTOREP) à la place des CDOI.
9 décembre 1975 Déclaration des droits des personnes handicapées adoptée par l’ONU.
25 janvier 1978 Décret relatif aux Équipes de Préparation et de Suite au Reclassement (EPSR).
1980 Création des Groupements Interprofessionnels Régionaux pour le Promotion de l’Emploi des Personnes handicapées (GIRPEH).
1981 Année internationale des personnes handicapées déclarée par l’ONU.
7 janvier 1981 Loi relative à la protection de l’emploi des salariés victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle. Le contrat de travail est suspendu pendant la durée de l’arrêt de travail et du stage de réadaptation, de rééducation ou de formation accordé sur décision de la COTOREP. Cette loi limite également le droit de l’employeur au licenciement et oblige ce dernier à proposer un nouveau poste au salarié devenu inapte.
12 mars 1981 Charte européenne des handicapés de l’Assemblée européenne.
1982 Création et développement des Organismes d’Insertion et de Placement (OIP).
10 juillet 1987 Loi portant sur le régime de l’obligation d’emploi en faveur des travailleurs handicapés. Elle fixe le taux légal d’emploi pour les entreprises de 20 salariés en le portant progressivement à 6 %. Pour les entreprises privées ne respectant pas ce quota, il est prévu le versement d’une contribution à l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (AGEFIPH), organisme paritaire administré par des représentants du patronat, des salariés et des associations. Enfin, elle étend l’obligation d’emploi au secteur public.
9 décembre 1989 La Charte sociale européenne du Conseil de l’Europe engage les États membres à prendre les mesures nécessaires en vue de garantir aux personnes handicapées l’exercice du droit à l’autonomie, à l’intégration sociale et à la participation à la vie de la communauté (art. 15).
13 juillet 1990 Loi relative à la protection des personnes contre la discrimination en raison de leur état de santé ou de leur handicap.
1990 Lancement des programmes partenariaux de l’AGEFIPH
13 juillet 1991 Loi portant diverses mesures destinées à favoriser l’accessibilité aux personnes handicapées des locaux d’habitation, des lieux de travail et des installations recevant du public.
1992 Transfert par l’Etat du financement des aménagements de postes et des surcoûts d’encadrement à l’AGEFIPH. Lancement des programmes départementaux pilotes de l’Etat, futurs PDITH.
31 décembre 1992 Loi étendant l’obligation de rechercher une possibilité de reclassement à tout salarié devenu physiquement inapte.
4 novembre 1993 Décret prévoyant un guide-barème instaurant huit grandes catégories de déficiences.
18 janvier 1994 Loi prévoyant le complément d’Allocation pour Adultes Handicapés (AAH).
26 janvier 1994 Décret relatif à l’accessibilité des locaux d’habitation, des établissements et installations recevant du public.
1996 Création de l’Association Nationale de Défense des Victimes de l’Amiante (ANDEVA).
2 octobre 1997 Traité d’Amsterdam incluant un article général concernant la non-discrimination (article 13). Cet article confère expressément et pour la première fois à l’Union le pouvoir d’agir dans le domaine du handicap et reconnaît le problème de la discrimination fondée sur le handicap.
2 août 2000 Arrêté définissant le handicap rare.
17 janvier 2002 Loi dite « de modernisation sociale » prévoyant l’indemnisation des handicapés congénitaux et créant des conseils départementaux consultatifs des personnes handicapées (CDCPH), chargés de faire des propositions pour mettre en œuvre au niveau local la politique en direction des personnes handicapées.
2003 Année européenne des personnes handicapées.
2003 Premiers États généraux de la citoyenneté des personnes handicapées à Paris.
19 décembre 2003 Décret réformant les COTOREP.
6 mai 2004 Création de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) chargée de contribuer au financement d’actions favorisant l’autonomie des personnes handicapées et des personnes âgées dépendantes. Cette caisse finance notamment la prestation de compensation personnalisée ainsi qu’une partie du coût de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA).
30 juin 2004 Loi relative à la solidarité pour l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.
30 décembre 2004 Loi portant création de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité. Elle prévoit la répression pénale de la diffamation, de l’injure, de la provocation à la discrimination, de la haine ou de la violence sexiste, handiphobe ou homophobe.
11 février 2005 Loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Cette « loi handicap » instaure notamment un principe de « compensation » qui permet aux travailleurs handicapés d’être sur un pied d’égalité sur le marché du travail, de même qu’une fois en poste. La compensation passe aussi bien par des adaptations techniques du poste (amélioration des accès, changements de machine ou d’outillage…), que par la formation, l’accompagnement ou encore l’aménagement des horaires. La loi renforce également l’obligation d’emploi pour les entreprises de plus de 20 salariés et augmente le montant de la contribution annuelle à l’Agefiph en cas de non-respect du quota de 6 % de travailleurs handicapés. Elle étend au secteur public le principe de contribution et créé le Fonds pour l’Insertion des Personnes Handicapées dans la Fonction Publique (FIPHFP).
2006 Convention sur les droits des personnes handicapées adoptée par l’ONU.
6 novembre 2009 Décret portant création du Comité interministériel du handicap, placé auprès du Premier ministre et chargé notamment de définir, coordonner et évaluer les politiques conduites par l’Etat en direction des personnes handicapées.