(Suite de la première partie)

La Première Guerre mondiale constitue une formidable opportunité pour la métallurgie. Les commandes militaires favorisent l’éclosion de futurs grands groupes comme Dassault, Citroën ou Renault et l’accumulation d’insolents profits. Schneider et Cie réalise ainsi jusqu’à 40 % de marge… « On croit mourir pour la patrie, on meurt pour les industriels », rappelait à juste titre Anatole France en 1922 dans L’Humanité.

L’UIMM, interlocutrice inévitable de la réorganisation de l’économie, impulse la création de groupements régionaux servant d’intermédiaire entre l’armée et les entreprises. Une crise interne, opposant industries de transformation à celles de production, débouche toutefois en 1917 sur la limitation de ses compétences aux questions sociales, ouvrières et fiscales. En échange, elle obtient davantage de moyens et amorce son émancipation à l’égard du Comité des Forges.

La montée en puissance (1919-1935)

Après-guerre, le patronat se regroupe, à l’initiative d’Étienne Clémentel, ministre du Commerce et de l’Industrie, dans la Confédération générale de la production française (CGPF), ancêtre de l’actuel MEDEF. L’UIMM s’y investit naturellement, tout en affermissant son autorité grâce à l’afflux d’adhérents. Petit à petit, son organigramme s’étoffe, avec le recrutement de permanents au solide bagage juridique et la création de structures « indépendantes », dont la plus célèbre est la caisse d’assurance contre le chômage forcée (en clair, contre les grèves).

Durant l’entre-deux-guerres, les principaux combats de l’UIMM concernent le temps de travail, la protection sociale et la formation professionnelle. Dans l’ensemble son attitude est défensive. Elle entend empêcher les ingérences de l’État et des salariés, maintenir le contrôle patronal et limiter au maximum les impôts et cotisations sociales.

Face au Front populaire (1936-1939)

Le 11 mai, quelques jours après la victoire de la gauche aux législatives, des débrayages éclatent dans l’aéronautique avant de gagner l’ensemble du pays. Les accords Matignon du 7 juin octroient une augmentation substantielle des salaires, créent les délégués du personnel, relancent les conventions collectives. Dans la foulée, les congés payés et les quarante heures sont adoptés.

Bousculé, dispersé, le patronat est contraint de lâcher du lest. Mais il redresse vite la tête et parvient à repousser le projet de convention collective nationale portée par notre Fédération et à obtenir des dérogations aux quarante heures.

Sa revanche est totale lors de la grève du 30 novembre 1938 contre la casse des conquêtes du Front populaire. La répression est terrible : 800 000 ouvriers sont licenciés. Le patronat refuse de réembaucher les militants syndicaux, si bien qu’en janvier 1939, 15 000 sont sans emploi. Avec cette « Saint-Barthélemy syndicale », la déstabilisation du patronat aura été de courte durée.

La Collaboration (1940-1945)

Participant sans enthousiasme aux préparatifs de guerre, l’UIMM accueille la défaite de juin 1940 avec pragmatisme. Entre Hitler et le Front populaire, le choix avait été fait.

L’instauration de la Charte du Travail en octobre 1941 s’effectue avec l’appui de l’UIMM, qui échappe à la dissolution qui frappe les organisations patronales et syndicales nationales. Elle y voit le moyen de faire prévaloir le paternalisme et la collaboration de classes dans les relations professionnelles, en s’inquiétant toutefois du poids croissant de l’État.

Dans sa grande majorité, le patronat de la métallurgie a collaboré avec l’occupant nazi, au nom du « réalisme économique », une attitude qui leur valût une franche hostilité populaire à la Libération…