Alors que les concertations sur la réforme des retraites battent leur plein en France, un sujet revient régulièrement sur la table : la retraite par capitalisation ou épargne retraite. Présentée comme une solution miracle pour compenser la baisse annoncée des pensions, elle est en réalité un piège dangereux pour les salariés, notamment les ingénieurs, cadres et techniciens qui représentent plus de la moitié du salariat. Derrière les discours séduisants des assureurs et du gouvernement, se cache une logique de capitalisation qui menace notre système solidaire par répartition et creuse les inégalités.

Un système par répartition sous pression

Le gouvernement et le Medef avancent masqués. Sous prétexte de sauver le système par répartition, ils préparent en réalité son affaiblissement progressif. Leur objectif ? Réduire les pensions publiques tout en poussant les salariés vers des systèmes d’épargne retraite privés, calqués sur le modèle des fonds de pension américains. Cette stratégie est d’autant plus pernicieuse qu’elle s’accompagne d’incitations fiscales généreuses pour les produits d’épargne retraite, comme le montre la loi PACTE de 2019. Résultat : les cotisations vers l’épargne retraite ont augmenté d’un tiers, drainant des milliards d’euros hors du système solidaire.

Pourtant, le système par répartition, financé par les cotisations des actifs, est robuste. Il a résisté à toutes les crises. Contrairement à ce que prétendent ses détracteurs, il ne peut pas faire faillite. En revanche, l’épargne retraite, basée sur la capitalisation, expose les salariés à des risques considérables : volatilité des marchés, absence de garantie sur le capital épargné, et frais de gestion exorbitants. Les assureurs et gestionnaires de fonds, comme BlackRock, engrangent des profits colossaux, tandis que les salariés prennent tous les risques.

Le piège de l’épargne retraite

Aucune garantie de restitution : le système des « cotisations définies » signifie que l’épargnant prend le risque des marchés financiers, sans garantie de récupération du capital, comme le montre la crise de 2008.

Un coût exorbitant : épargner pour sa retraite coûte bien plus cher que cotiser. Pour compenser une baisse de 10 points du taux de remplacement (actuellement de 75 % en moyenne), il faudrait épargner l’équivalent d’un mois de salaire par an pendant 30 ans ! Une mission impossible pour la plupart des salariés, surtout dans un contexte d’inflation et de précarité croissante.

Un marché juteux pour les assureurs, un piège pour les salariés

Le développement de l’épargne retraite profite, avant tout, aux assureurs et banques grâce à des exonérations fiscales, au détriment des finances publiques. Pire encore, les entreprises proposent des plans collectifs d’épargne retraite, transformant des primes en transferts de salaires sans retour garanti.

L’urgence de défendre notre système solidaire

Face à cette offensive, il est essentiel de défendre un système solidaire. Plutôt que de promouvoir l’épargne retraite, il faut renforcer le financement des retraites publiques en augmentant les cotisations patronales et en luttant contre l’évasion fiscale. Il faut également reconnaître les années d’études et l’usure professionnelle, notamment pour les ICT, dont la pénibilité est souvent ignorée.

Une réforme juste et solidaire est possible, où chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins. Ne laissons pas les assureurs et le gouvernement détruire notre système de retraite !

Christine Chiffre, Membre du Secrétariat de l’UFICT

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