Cliquez ici pour regarder l’intervention CGT (audition commission Sénat / sidérurgie)

 

État de la filière (point depuis 2012/2013, date des rapports FAURE et de celui de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur l’acier) :

  • La production française est tombée à 15,5 millions de tonnes annuelles suite à :

Dans la filière des aciers électriques :

  • Ascométal : fermeture du site du Cheylas (Isère) et de l’aciérie du site des dunes (Nord).
  • Aubert&Duval (groupe ERAMET) : arrêt de l’aciérie de Firminy (Loire)
  • Akers (cylindres) : fermeture des sites de Berlaimont (Nord) et de Thionville (Moselle)

Dans le marché du tube :

  • Vallourec : fermeture des laminoirs de St Saulve (Nord) et de Deville lès Rouen (Seine maritime).
  • Europipe : fermeture de son établissement de dunkerque (Nord)

Dans la filière fonte :

  • ArcelorMittal : fermeture des 2 hauts fourneaux et de l’aciérie de Florange (Moselle), du décapage/laminage de Basse Indre (Loire Atlantique)

Il est clair que nous restons confrontés, sur toutes ces filières, à la fois à un désinvestissement et à une stratégie de délocalisation (vers l’Europe, l’Asie ou l’Amérique).

État de la demande d’acier :

Si effectivement il y a eu, suite à la crise financière fin 2008, une chute de la demande d’acier, celle-ci a progressivement remonté, à la fois en France et en Europe. Or, malgré l’alerte des rapports Faure de 2012 et de celui de l’assemblé Nationale en 2013 sur l’érosion de nos capacités de production, les fermetures de capacité se sont poursuivies (on vient de lister les principales). Constat aujourd’hui : la balance commerciale Acier de la France, comme celle de l’UE, est devenue déficitaire, avec des importations qui augmentent très fortement encore ces derniers mois. Nous manquons d’acier en France, suite à ces réductions de capacités et à une focalisation des producteurs sur les marchés à haute valeur ajoutée (auto par exemple). C’est une stratégie de l’offre qui se poursuit, pour monter le prix de l’acier et garantir un haut niveau de dividende. A titre d’exemple, on consomme aujourd’hui deux fois plus de produits longs en France qu’on en produit. Quelques extraits de rapports indépendants viennent conforter l’analyse de la CGT :

Extraits du rapport sur l’analyse de la vulnérabilité d’approvisionnement en matières premières des entreprises françaises, remis au gouvernement en mars 2019 :

« Cette explosion des besoins, liée à l’urbanisation croissante et à la forte demande de consommation des nouvelles classes moyennes issues des pays émergents, ne se limite pas aux métaux stratégiques ou critiques ; elle s’étend aux matières premières de base, telles que le cuivre, l’acier et l’aluminium, utilisées notamment dans les secteurs du logement et des infrastructures de transport (ferroviaire ou énergétique par exemple) ». « Au total, la quantité cumulée de métaux de base (acier, cuivre et aluminium) nécessaire en 2050 pour générer les infrastructures de production électrique à partir d’EnR atteindrait entre 6 et 11 fois la production mondiale totale de 2010, en l’absence de nouvelles technologies productives moins consommatrices de ressources. »

Pour rappel, quelques extraits des rapports Faure et parlementaire de 2013 :

 Rapport FAURE (2012) :

 Sur Florange : « Les avantages d’une telle intégration (filière liquide et transformation à froid) sont de plusieurs ordres : 

  1. Une économie sur les coûts de logistique pour le transport des semi-produits ;
  2. La possibilité de réduire les stocks de semi-produits ;
  3. Une interaction plus étroite entre la filière chaude et la filière froide qui facilite la mise en œuvre d’une vaste palette de nuances d’acier pour répondre au plus près aux demandes des clients.

Le maintien et le développement d’un site sidérurgique intégré compétitif à Florange nécessite un effort d’investissement rapide et significatif pour moderniser l’outil de production. La conservation d’une capacité de production sidérurgique dans la filière liquide en France est un enjeu stratégique national : Il est d’intérêt national de conserver sur le territoire français des capacités de production d’acier suffisantes dans la filière liquide. Compte tenu des débouchés en aval dans l’industrie, la capacité globale de production de la filière liquide pour les aciers plats des sites de Dunkerque, Fos et Florange paraît constituer un plancher à maintenir. Par ailleurs la répartition de la capacité de production sur trois sites réduit la vulnérabilité globale. »

On connait la décision d’ArcelorMittal en fin d’année dernière de fermer définitivement la filière liquide de Florange, avec un silence assourdissant du gouvernement, alors qu’il y avait un accord entre l’État et le groupe ArcelorMittal sur les conditions de redémarrage. 

Rapport parlementaire de 2013 :

 « Il serait illusoire de considérer que notre pays devrait exclusivement concentrer ses capacités de production sur des activités de « niches » à forte valeur ajoutée, alors que les transformateurs et d’autres métiers y compris s’agissant de technologies de pointe pourraient s’approvisionner en « commodités » et matériaux bruts sur les marchés étrangers. Le désengagement puis l’abandon des activités de base hypothéqueraient gravement notre indépendance et ne manqueraient pas de subordonner plus encore la stratégie industrielle de nombreuses entreprises à l’errance des marchés. »

La CGT, mais aussi des analystes du secteur, considère qu’il faut remonter notre production d’acier à minima, vers les 20 millions de tonnes annuelles, au vu de la demande actuelle insatisfaite et des besoins à venir.

Emploi : Malgré le signal d’alarme émis par les rapports précédents, les destructions d’emplois se sont poursuivies, pour preuve :

      Filière / groupes                2013                   2017
           Sidérurgie                25720              21800 (source Eurofer)
         ArcelorMittal                18176 (ETP cdi+cdd)              15689 (ETP sept)
            Ascométal                 1950               1400
            Vallourec                 5000               3500

L’abus du recours à l’intérim reste une réalité, avec un turn over très important et une augmentation importante des démissions. Les compétences sont impactées, dans toutes les catégories professionnelles. La ligne rouge étant franchie, la CGT réclame la relance de l’embauche, entre autres :

  • le renouvellement un pour un des départs en retraite (qui vont encore être massifs jusqu’en 2025, 100 000 par an dans la métallurgie)).
  • L’intégration des contrats précaires en CDI.

Statuts, attractivité des métiers :

Convention collective : nos conventions collectives territoriales ou nationale (sidérurgie) sont menacées dans la négociation en cours avec l’UIMM, dénommée « dispositif conventionnel). Objectif patronal : réduire les droits collectifs et casser le principe du paiement de la qualification pour renouer avec un paiement au poste occupé. La prime d’ancienneté est également remise en cause. Cette négociation est engagée depuis plus de 2 ans, l’UIMM veut boucler les affaires d’ici la fin de l’année.

La CGT réaffirme le principe de reconnaissance :

  • Des diplômes de l’Éducation nationale (tous les diplômes).
  • Des formations qualifiantes,
  • De l’expérience professionnelle
  • La mise en place d’un salaire minimum (sans qualification) démarrant à 1800 euros et une perspective continue d’évolution de carrière, avec au minimum doublement du salaire sur la carrière complète. Ceci sur une grille unique, d’une échelle de salaire de 1 à 5, allant de l’ouvrier à l’ingénieur.

Conditions de travail : Une grande partie du personnel est en régime de travail alterné, mais aussi exposé, entre autres, à la chaleur ou au bruit. La CGT revendique de meilleures conditions de travail et une prise en compte de la pénibilité pour déboucher sur des départs anticipés en retraite. La carence en investissement et le volant de précarité aggrave encore davantage ces conditions. Des processus de production plus respectueux de l’environnement, c’est possible ; captage et valorisation du CO2 :

Alors que le groupe ArcelorMittal décide, sans débats avec les syndicats ni même de débat public d’acheminer le CO2 en mer du Nord pour l’enfouir dans les fonds sous-marins, la CGT propose la valorisation du CO2 grâce à l’hydrogène : production de méthane pour injection dans les circuits de gaz naturel. C’est inscrit dans nos propositions de filière de production d’hydrogène, notamment sur Dunkerque, mais duplicable sur fos sur Mer. Eco circulaire avec les aciéries électriques : Ascoval en est l’exemple type, avec la valorisation de la filière ferraille (vous avez d’ailleurs reçu la fédération du recyclage FEDEREC, qui s’alarme de la fermeture en cascade des aciéries électriques dans le pays. La CGT revendique la réimplantation de capacités de production, notamment en Lorraine.

Intervention de l’Etat et des Régions dans les stratégies menées : 

  1. La piste de prise de capital dans les groupes, par la BPI, à une hauteur suffisante, était proposée par le rapport parlementaire de 2013 : Recommandation n° 13 :  « Définir une doctrine spécifique d’investissement de la Banque publique d’investissement (BPI) en rapport aux besoins des filières et qui puisse se traduire par des prises de participations significatives au capital et rompre ainsi avec le mouvement de mainmise de groupes étrangers sur les entreprises sidérurgiques et métallurgiques, un phénomène qui s’est accéléré en France au cours de la dernière décennie. »
  2. Exiger de réelles contreparties aux aides publiques.
  • Le CICE cumulé pour le secteur Acier est estimé à environ 30 millions d’euros pour l’année 2018. Pour quels résultats ?
  • Quel suivi de la stratégie de British Steel/ Greybull sera mis en place, alors que ce groupe vient de reprendre Ascoval avec des prêts Etat/Région/Valenciennes métropole à hauteur de 47 millions d’euros.
  • Quelle intervention de l’Etat et de la Région Hauts de France face à la stratégie de délocalisation du groupe Vallourec, sachant que ce dernier a bénéficié de près de 750 millions de fonds publics ces 10 dernières années, et avec l’Etat premier actionnaire ?
  • Quel contrôle de l’utilisation du CIR chez Arcelor, sachant que ce groupe est l’un des derniers de la classe en budget R&D ?
  • 3. Comme pour d’autres secteurs, et à l’inverse des orientations politiques actuelles, il faut donner davantage de pouvoir d’intervention des salariés et de leurs représentants sur les stratégies, notamment un droit suspensif aux suppressions d’emplois et décisions de délocalisations.