A l’occasion de l’inauguration de la place Roger Linet le vendredi 11 mars à 11h devant la maison des Métallos, 94 rue Jean-Pierre Timbaud dans le XIe arrondissement de Paris en présence de Bertrand Delanoe et Bernard Thibault, retrouvez le témoignage de Bernard Lamirand, président de l’IHS métallurgie.

Je ne ferai pas dans ce papier l’éloge de ce militant hors pair, député communiste de la quatrième circonscription de la Seine, compagnon de Croizat, ancien secrétaire général du syndicat CGT de Renault Billancourt et ancien dirigeant de la FTM-CGT. L’hommage lui sera rendu le 11 mars par la représentante du maire de Maire de Paris Catherine Vieux Charrier, de Patrick Bloch maire du onzième arrondissement et par le Secrétaire Général de la CGT Bernard Thibault.

Roger Linet, je l’ai connu tardivement, à l’occasion de mes responsabilité de secrétaire de la Fédération CGT de la Métallurgie, et lors de rencontres, notamment celles autour de la présentation de ses livres concernant « la Traversée de la tourmente », « la Résistance en enfer », « Renault, les années chaudes de la guerre froide ».

Dans ces livres, il nous a raconté sa vie militante et celles de ses compagnons de lutte, sa vie de résistant, son communisme et il nous a aidé à prendre l’histoire à bras le corps pour que l’homme se dégage de l’exploitation de l’homme par l’homme, s’émancipe et se libère, sorte de l’horreur fasciste et de la violence d’une classe qui n’aiment que des travailleurs assujettis.

J’ai participé avec lui à quelques conférences débats avec des jeunes dans les entreprises et son talent de conteur, ses anecdotes, sa fraternité exprimaient ce que doit être le monde du travail d’aujourd’hui: un monde du travail qui rassemble et qui lutte contre le capitalisme et contre la « bête immonde » qui l’a conduite, lui et ses camarades, dans l’enfer des camps de concentration où la mort régnait en maitre.

J’ai visité le camp du Struthof avec son camarade Max Nevers, compagnon dans la détention, et j’ai vu les souffrances endurées pas ces hommes et ces femmes face à leurs bourreaux nazis.

J’ai visité aussi Auschwitz, ce camp de la mort; les hommes qui s’en sont sortis de ces camps comme Roger Linet, Max Nevers, Roger Leroy déportés à Natzweiler-Struthof puis à Dachau, en sont restés marqués à vie mais ils avaient acquis une foi inébranlable en l’homme malgré ces exterminations. Ils discernaient toujours les dangers et comme le qualifiait Berthold Brecht « le ventre est encore fécond d’où a surgi la bête immonde ».

Roger Linet, rentrant d’occupation, a retrouvé ses camarades et s’est tout de suite relancé dans les luttes de l’époque et il devint le secrétaire du puissant syndicat CGT de Renault Billancourt et il a aidé à la formation de nombreux dirigeants syndicaux CGT et communistes dans cette entreprise.

Il avait le sens de l’évolution de choses, du mouvement ouvrier, de la lutte de classe dans cette période difficile de la guerre froide. Ce grand dirigeant a été, à un moment donné, du fait de désaccords politiques mis de coté, il a été grand et il ne s’est pas découragé. Il a continué sa vie militante en dirigeant l’Union Fraternelle des syndicat CGT de la Région Parisienne qu’il a développé avec des camarades qui l’ont rejoint pour faire de cette union fraternelle aujourd’hui une grande organisation de réinsertion sociale des métallos parisiens.

Il a écrit un ouvrage sur cette période de sa vie militante : Renault 1947-1958 Les années chaudes de la guerre froide.

J’ai aimé cet homme de grande fraternité. Quand nous avons décidé de créer l’Institut d’histoire de la Métallurgie, Jean Louis Fournier, alors le secrétaire général de la FTM CGT, a tout de suite pensé de lui demander d’en être le président d’honneur avec Henri Rol Tanguy. Ils ont accepté cette proposition qui était somme toute incontestable, l’histoire des métallos CGT leur devait cela. Ils sont toujours aujourd’hui nos présidents d’honneur à titre posthume.

Nous ne les oublions pas et le 11 mars nous serons très nombreux à leur rendre hommage dans cette rue qui porte le nom de Jean Pierre Timbaud, leur compagnon de lutte. Le square sans nom où est érigée une statut portera enfin le nom d’un grand dirigeant syndicaliste et communiste et dans la maison des métallos sera inaugurée le même jour une salle portant les noms d’Henri et de Cécile Rol-Tanguy.

Quoi de plus naturel que ce jour là, ces trois dirigeants de la métallurgie parisienne : Jean-Pierre Timbaud, Henri-Rol Tanguy, Roger Linet soient réunis dans ce haut lieu des luttes des métallos parisiens.

Quelques temps avant de mourir Roger m’avait dédicacé un de ses livres et il avait accompagné sa signature de cette citation: « A Bernard Lamirand. La vie est belle qu’en pleine liberté: la liberté est souvent menacée. Cela vaut la peine de la défendre. Les enseignements de 1933-45 peuvent aider à comprendre les dangers d’aujourd’hui. Bien fraternellement Roger Linet ».

Oui, relisons les ouvrages de Roger, c’est utile en ce moment où la liberté souffle d’un vent nouveau au Moyen-Orient et au Maghreb mais aussi cette bête immonde qui se manifeste à nouveau avec sa figure haineuse en ce moment en Europe et surtout en France.