Les ordonnances MACRON de septembre 2017 ont bouleversé les logiques d’organisation de notre droit du travail et nous obligent donc à modifier notre façon de l’appréhender. Ainsi, en matière de négociation collective, les ordonnances ont inversé la hiérarchie des normes. Cela signifie que les accords négociés au niveau de la branche ne constituent plus un socle minimal qui doit être respecté lors des négociations dans l’entreprise. Néanmoins les ordonnances ont tout de même conservé la primauté de la branche sur plusieurs sujets dont le salaire minimum hiérarchique (SMH).

Définition en attente
En effet, l’article L2253-1 du Code du Travail précise que pour les salaires minima hiérarchiques, le contenu de l’accord de branche prévaut sur la convention d’entreprise conclue antérieurement ou postérieurement, sauf lorsque celle-ci assure des garanties au moins équivalentes. La notion de SMH est une notion nouvelle, jusqu’alors inexistante dans le Code du travail. Le législateur l’a utilisé sans la définir. Pour combler ce vide, le Ministère du travail via la Direction générale du travail (DGT), a décidé d’établir une définition de ce SMH, au moment du passage en commission d’extension1 des accords salariaux conclus dans les branches professionnelles. Ce faisant, la DGT abuse de son pouvoir administratif, en effet seul le législateur ou le juge peuvent apporter une définition au SMH. De plus, elle a empiété sur la liberté contractuelle des acteurs sociaux en bloquant pendant des mois la procédure d’extension de dizaines d’accords salariaux conclus pour l’année 2018. Ce n’est pas sans conséquence pour des centaines de salariés, notamment dans les TPE/PME de la métallurgie, qui sont payés selon ces grilles de minima de branche. Par son attitude, la DGT a ainsi contribué à l’absence d’augmentation des salaires pour 2018 de ces travailleurs.

Les compléments de salaire
La définition du SMH arrêtée par la DGT est la suivante : « salaire de base stricto sensu intégrant les avantages en nature mais excluant tout complément de salaire » (ex : primes diverses). Pourquoi exclure ces primes ? La DGT s’est fixé pour mission de veiller à la bonne application des textes, en particulier les dispositions de la loi Travail II issue des ordonnances. Cette loi empêche désormais la branche de rendre obligatoire, pour les entreprises, certains éléments de rémunération comme les primes (inversion de la hiérarchie des normes).

Conséquences aujourd’hui et demain
Chaque convention collective territoriale ainsi que la convention collective nationale des ingénieurs et cadres disposent d’une grille de minima salariaux (appointements, RAG, TEGA…). Lors de la négociation de ces grilles, nous devons être vigilants à la constitution de l’assiette de vérification de ces minima. Pour nous elle est simple : le salaire de base du salarié (1ère ligne de sa fiche de paie) c’est au moins le salaire minimum défini par la grille et c’est aussi le SMH. Tous les éléments annexes ou complémentaires comme par exemple la prime de panier, transport, vacances… ne doivent pas servir aux employeurs à atteindre les niveaux négociés dans les grilles de branche. Ils ne servent pas à reconnaître pécuniairement la qualification du salarié. Ils sont juste la contrepartie de sujétions ou de conditions de travail particulières, ils ne doivent donc pas faire partie de l’assiette de vérification du respect des minima.
La branche ne peut plus légalement imposer aux entreprises de payer les primes diverses qu’elle a négociées puisque la hiérarchie des normes a disparu en la matière. Mais la branche peut tout de même continuer à les définir et c’est dans l’entreprise que la lutte aura certainement à s’organiser pour leur versement effectif. Il est donc important de se battre sur les deux points lorsqu’on va négocier dans nos territoires :
– Définir ainsi l’assiette de vérification : Salaire de base = minimum fixé par la branche = SMH
– Maintien dans les conventions collectives et à un haut niveau des diverses primes qui existent (même si légalement elles ne s’imposent plus aux entreprises). ( POURQUOI ? )