En renversant la hiérarchie des normes, la loi El Khomri a donné une place plus importante à l’accord d’entreprise. Pour légitimer le contenu de celui-ci, la loi a aussi prévu une généralisation progressive de la validation majoritaire des accords d’entreprise.
L’accord majoritaire fait partie des repères revendicatifs de la CGT mais la loi minore de suite le principe majoritaire par l’instauration du référendum.

Une mise en œuvre progressive
L’application des nouvelles règles de conclusion des accords a été étalée :
– depuis le 9 août 2016, pour les nouveaux accords de préservation du développement de l’emploi,
– depuis le 1er janvier 2017 pour les accords collectifs relatifs à la durée du travail, aux repos et congés (partie du Code où la loi travail a complètement inversé la hiérarchie des normes),
– à partir du 1er septembre 2019 pour les autres accords (calendrier lié au travail demandé par la loi travail à une commission d’experts chargée d’inverser la hiérarchie des normes pour le reste du Code du Travail).
Ainsi, désormais, pour être valable, l’accord collectif doit être signé par :
– une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés,
– ou par des organisations syndicales représentatives représentant au moins 30 % des suffrages exprimés et dont la signature sera validée par un référendum dans l’entreprise.

Un nouveau mode de calcul des seuils de 50 % et 30 %
Les taux de 50 % et 30 % sont calculés à partir des suffrages exprimés en faveur de syndicats représentatifs c’est-à-dire ceux ayant obtenu au moins 10 %. On neutralise les suffrages des syndicats non représentatifs. Un tel calcul aboutit à augmenter le taux de représentativité des organisations syndicales et permettra ainsi de franchir plus facilement la barre des 50 %. La loi est silencieuse sur le sort des accords traitant de différents sujets, ce qui les feraient dépendre de deux modes de validité (accord majoritaire pour le volet durée du travail et congés et accord à 30 % sans droit d’opposition pour les autres volets comme l’égalité professionnelle ou la formation par exemple). Il sera donc préférable de conclure des accords distincts ou de définir par la négociation sous quel régime on entend placer la conclusion de l’accord.
Le référendum, outil à la seule main des signataires, est déclenché à la demande de ces derniers dans un délai d’un mois à compter de la signature de l’accord et à la condition qu’ils pèsent au moins 30 %. Cette demande ouvre alors un délai de réflexion de huit jours pour que les non signataires reviennent ou pas sur leur décision. A l’issue de ce délai, si l’accord demeure minoritaire, le référendum sera organisé par l’employeur dans les deux mois. Les modalités sont établies dans un protocole spécifique conclu entre l’employeur et les signataires du projet d’accord. Le protocole doit fixer :
– les modalités de transmission du texte aux salariés,
– la date, l’heure et le lieu du scrutin,
– les modalités d’organisation du vote (sous enveloppe ou vote électronique),
– la question posée aux salariés,
– les salariés pouvant voter.
Les contestations de ce protocole peuvent être portées devant le tribunal d’instance.Le résultat du vote des salariés doit faire l’objet d’un procès verbal affiché dans l’entreprise. Si la majorité des suffrages exprimés conforte les signataires minoritaires, l’accord est alors valide. A défaut, l’accord est réputé non écrit. La loi est alors silencieuse, pas d’obligation de part et d’autre de se retrouver autour de la table des négociations.