L’obligation de loyauté dans la négociation collective est une question importante que vient compléter régulièrement la jurisprudence de la Cour de Cassation. Elle concerne tous les secteurs de la négociation collective.

La déloyauté patronale sanctionnée
Plusieurs exemples de déloyauté patronale ont déjà été sanctionnés. Par exemple, après un long processus de négociation, l’employeur réuni une partie seulement des syndicats et apporte des modifications, avec ces seuls syndicats au projet en discussion des modifications en vue d’obtenir leur signature. Ceci se déroule sans les autres syndicats. Or, pour la justice, l’adoption de ces modifications “était bien de nature à modifier l’appréciation que chacun des syndicats demandeurs était susceptible de porter sur le texte alors réellement soumis à signature” ; et encore “attendu que (dans) le contexte d’une telle négociation, nécessairement précise et minutieuse pour avoir eu besoin de vingt-sept réunions sur plus d’une année, ces modifications sont trop substantielles pour pouvoir être raisonnablement tenues pour anodines et purement formelles avec un simple objectif de correction”. Tous les syndicats doivent donc être appelés à la négociation (TI Nanterre 9 mars 2001).
Autre exemple, si les « bilatérales » sont admises sous conditions aujourd’hui, la négociation finale doit se faire en présence de tous (Cass. soc., 8 mars 2017, n° 15-18.080 FS-PB). C’est l’occasion pour la Cour rappeler les hypothèses de déloyauté dans le processus de négociation et qui sont susceptibles d’aboutir à l’annulation de l’accord collectif. Il en va ainsi lorsque :
– toutes les organisations syndicales n’ont pas été convoquées à la négociation
– l’existence de négociations séparées est établie ;
– les organisations n’ont pas été mises à même de discuter les termes du projet soumis à la signature en demandant, le cas échéant, la poursuite des négociations jusqu’à la procédure prévue pour celle-ci.

Distinguer négociations séparées et échanges bilatéraux
Ces différents cas d’annulation avaient déjà été identifiés dans l’arrêt SEB de 2007(Cass. soc., 10 octobre 2007, n° 06-42.721). L’intérêt de l’arrêt du 8 mars 2017 réside plus particulièrement dans la distinction opérée par les Hauts magistrats entre des négociations séparées (qui sont une cause d’annulation de l’accord collectif) et des échanges bilatéraux tenus entre deux réunions avec certains négociateurs. Il apparaît en effet que ces échanges sont tolérés et ne sont pas considérés comme présentant un caractère déloyal s’ils ont été répercutés à l’ensemble des négociateurs pour être discutés. Ce qui implique que si des modifications sont apportées au projet d’accord en fonction du résultat de ces échanges bilatéraux, il faut absolument que le projet soit soumis ensuite à l’ensemble des participants lors d’une nouvelle réunion de négociation.

Imposer l’effictivité de la négociation
D’autres obligations de loyauté dans la négociation collective. Dans un certain nombre de cas, l’employeur peut imposer ses choix en cas d’échec de la négociation (protocole d’accord pré-électoral…). Néanmoins obligation de négocier ne signifie pas obligation de conclure. La négociation doit être réelle et non formelle (Circ. DRT n° 1983/15, 25 oct. 1983). A nous par le rapport de force et notre activité d’imposer l’effectivité de la négociation. Si la loyauté est dans le Code du Travail, elle n’est pas dans l’ADN patronale. Nos expériences personnelles, dans tous les domaines au quotidien nous le démontre.