Le moment que nous vivons tous, salariés, retraités, parents…est tout aussi inédit que générateur d’inquiétude ou même d’anxiété, particulièrement pour ceux devant se rendre sur leur lieu de travail.

On pourrait dès lors attendre des autorités que la protection de tous contre le COVID-19, assénée à longueur d’antenne, intègre aussi la protection des salariés à leur poste de travail. Mais non ce Gouvernement aux ordres du patronat et particulièrement des grandes entreprises, a fait le choix insensé de la poursuite de l’activité économique, incitant les salariés à aller travailler et ce, même si l’activité n’est pas vitale pour la Nation.

On l’a vu dès la première semaine du confinement, les salariés de la métallurgie ont fait part de leurs inquiétudes légitimes utilisant très largement leur droit de retrait accompagné du droit d’alerte des élus CGT. La réponse des dirigeants du pays ne s’est pas faite attendre puisque la loi instaurant l’état d’urgence sanitaire ouvre de sérieuses brèches dans les droits des salariés et confine pour les mois à venir le code du travail au fond du placard.

Le principe de l’état d’urgence est de créer une situation d’exception qui permet au Gouvernement de légiférer par ordonnances, sans passage devant l’Assemblée Nationale et le Sénat. Ainsi pour le volet droit du travail de cette loi, le Gouvernement dispose d’un délai de trois mois pour prendre, par ordonnances, toutes les mesures d’adaptation nécessaires. Ces mesures pourront avoir une application rétroactive au 12 mars 2020, premier jour de confinement.

Les droits et prérogatives visés par la loi 

1/ La possibilité par un accord d’entreprise ou de branche, d’autoriser l’employeur à imposer ou à modifier les dates de prise d’une partie des congés payés dans la limite de six jours ouvrables. Pour imposer cette semaine de congés, l’employeur pourra déroger aux délais de prévenance et aux modalités de prise de ces congés.

2/ La possibilité pour tout employeur d’imposer ou de modifier unilatéralement les dates des JRTT en dérogeant aux délais de prévenance et aux modalités d’utilisation prévue par les conventions et accords collectifs. Le principe est également applicable aux jours de repos prévus par les conventions de forfait et également aux jours de repos affectés sur le compte épargne temps du salarié.

3/ La possibilité pour les entreprises de secteurs particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation ou à la continuité de la vie économique et sociale de déroger aux règles d’ordre public et aux stipulations conventionnelles relatives à la durée du travail, au repos hebdomadaire et au repos dominical. Une première interrogation se pose d’ores et déjà : qu’est-ce qu’un secteur particulièrement nécessaire à la sécurité de la nation ou à la continuité de la vie économique et sociale ? Le risque sous-jacent c’est que le Gouvernement, fidèle à son dogme, décide qu’un grand nombre d’entreprises soient particulièrement nécessaires à la continuité de la vie économique et sociale !! Déroger à la durée du travail, ça veut dire déroger aux limites maximales quotidienne et hebdomadaire pour allonger encore plus les plages de travail.

4 / La modification des modalités d’information et de consultation des instances représentatives du personnel, notamment du comité social et économique, pour leur permettre d’émettre les avis requis dans les délais impartis, et la suspension des processus électoraux des comités sociaux et économiques en cours. Il est bon de rappeler ici que, selon le Préambule de la Constitution, « tout homme peut défendre ses droits et ses intérêts par l’action syndicale et adhérer au syndicat de son choix » et « tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises ». Par les lois successives (Rebsamen, El Khomri, Ordonnances Macron), ces principes républicains ont été mis à mal. L’orientation que donne la loi d’urgence vise à poursuivre la casse entamée. Pourtant, les nombreuses remises en cause de la sécurité au travail démontrent l’importance de ce contrôle. Les arguments du Conseil d’Etat (décision référé-liberté du 22 mars 2020)  concernant l’économie générale des textes renforce nos craintes. Il demande à l’état de préciser les mesures restrictives. Cela doit s’appliquer dans nos entreprises où pour des raisons financières, on oublie la santé des salariés et on veut coûte que coûte faire travailler.

5/ La modification, à titre exceptionnel, des dates limites et les modalités de versement des sommes versées au titre de l’intéressement et au titre de la participation.

6/ La modification de la date limite et des conditions de versement de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat dite « prime Macron ou gilets jaunes ».

7/ L’aménagement des modalités de l’exercice par les services de santé au travail de leurs missions, notamment le suivi de l’état de santé des travailleurs, et la définition des règles selon lesquelles le suivi de l’état de santé est assuré pour les travailleurs qui n’ont pu, en raison de l’épidémie, bénéficier du suivi prévu par le code du travail.

Des informations plus détaillées seront transmises au fur et à mesure de la parution des ordonnances dans les prochains jours.