Qu’elles soient patronales, politiques ou médiatiques, les forces du capital cultivent chaque jour la mise en opposition des différentes catégories de salariés. Elles veulent éviter un rassemblement du salariat mettant en cause la domination des 1 % qui possèdent non seulement l’essentiel du patrimoine mais disposent aussi des principaux leviers économiques et politiques du pays.
Rassembler le salariat
Au nom de la modernité, de l’égalitarisme et surtout de la déréglementation libérale, le statut cadre est stigmatisé comme un empêcheur d’exploiter en rond ! Surfant sur l’apparente incongruité à défendre la situation des cadres à un moment de crise et de développement de la misère, le Medef et l’IUMM visent un écrasement du salariat enlevant tout repère de promotion et fermant toute perspective d’évolution sociale.
Beaucoup d’observateurs ont souligné l’impact de ces politiques de déclassement généralisé et d’écrasement des rémunérations amenant ressentiment et fatalisme et se traduisant au plan politique par des votes d’extrême droite ou par le vote Trump aux États-Unis.
Au moment où notre pays connait une forte élévation de son niveau de qualification, c’est une baisse massive du prix du travail par le refus de rémunérer les qualifications que cherche à obtenir le patronat.
Un statut de l’encadrement renouvelé et solidaire
Ce qu’il est convenu d’appeler le statut cadre est constitué d’un ensemble d’éléments institutionnels (Agirc, Apec, Section encadrement aux Prud’hommes), légaux (temps de travail…) et conventionnels (conventions collectives ou avenants spécifiques cadres). C’est en fait davantage le début d’un statut de reconnaissance de la place et du rôle qu’occupent les salariés qualifiés à responsabilités dont il faudrait parler.
L’édifice est aujourd’hui fragilisé par la disparition programmée de l’Agirc qui, jusqu’à aujourd’hui est le seul organisme à opérer, de manière interprofessionnelle et opposable aux employeurs, la reconnaissance du statut fondée sur le niveau de formation exigé, les responsabilités exercées et l’autonomie dans l’exercice des responsabilités.
Une négociation interprofessionnelle est programmée pour 2017 sur la notion d’encadrement. Le Medef traine les pieds et a mandaté l’UIMM pour déconstruire la convention collective des cadres de la métallurgie en s’attaquant au point dur des classifications. L’objectif est notamment de peser sur la future négociation interprofessionnelle avec un encadrement instrumentalisé pour affaiblir les garanties de tous.
La situation actuelle comporte déjà des faiblesses : des repères dans les grilles de classification qui ne sont pas à la hauteur de la montée en gamme des qualifications et des responsabilités, une reconnaissance insuffisante des diplômes comme des droits associés au statut.
Forcer la reconnaissance des diplômes et de l’expérience
Le patronat vise clairement la disparition de la convention collective cadre avec l’objectif de non-reconnaissance des diplômes et des acquis de l’expérience. Casser les grilles de classification même minimales qui reconnaissent les niveaux de qualification revient à faire exploser les repères objectifs de vie en commun du collectif de travail et à produire de nouveaux éléments d’inefficacité y compris au plan économique.
Autre enjeu pour l’UIMM et le Medef : restreindre le périmètre de l’encadrement aux seuls cadres dirigeants alors que l’Ugict-CGT travaille sur une définition large couvrant la diversité de l’encadrement sur la base de l’autonomie, de l’expertise et de la responsabilité.
Le patronat cherche clairement à ne plus payer la qualification et à accélérer la baisse du prix de la force de travail qualifiée.
Impliquer la jeunesse diplômée particulièrement concernée est un des défis à relever pour déjouer l’offensive actuelle. Exiger un statut de l’encadrement renouvelé fondé sur des évaluations objectives des qualifications doit permettre aux cadres et professions techniciennes d’exercer et d’être reconnus dans leur professionnalisme et de jouer leur rôle contributif. Cette bataille est décisive dans l’obtention de droits et garanties ouvrant des perspectives d’évolutions pour tous.