Les 12, 13 et 14 octobre, l’Institut CGT d’histoire sociale de la métallurgie a co-organisé un colloque sur le thème « Peut-on écrire une histoire française du patrimoine soviétique ? ». Une manifestation scientifique originale à plus d’un titre !
Une manifestation originale
Originale tout d’abord par l’hétérogénéité des partenaires de ces trois journées : Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco), Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap), Institut CGT d’histoire sociale de la métallurgie, Maison des Métallos, mairie de Baillet-en-France, Musée archéologique du Val-d’Oise.
Originale ensuite par l’objet et le contenu de cette manifestation qui s’est interrogée, de manière volontairement un peu provocante, sur l’existence d’une histoire française du patrimoine soviétique en mobilisant, de manière pluridisciplinaire, des spécialistes d’histoire de l’art, d’histoire sociale, du patrimoine ; des archéologues ; des conservateurs ou encore des architectes venant de six pays différents.
Originale enfin par la forme, qui associe à la forme classique des colloques, une journée in situ, à Baillet-en-France et à Guiry-en-Vexin, à la poursuite des bas-reliefs du pavillon soviétique de l’Exposition Internationale de Paris en 1937, dont il a été largement question hier dans plusieurs interventions. À cela s’ajoutaient plusieurs événements en off, avec deux expositions, une première sur l’Exposition Internationale de Paris de 1937 et l’étonnant « destin patrimonial » du pavillon soviétique et une seconde sur l’histoire du parc des loisirs et de culture Henri-Gautier à Baillet-en-France ; la projection de plusieurs films (un court-métrage de Laurent Antoine présentant la reconstitution en 3D de l’intérieur du pavillon soviétique de 1937, le film Les Métallos de 1938 (visible sur le site internet de Cinéarchives : http://parcours.cinearchives.org/Les-films-METALLOS-_LES_-565-54-0-2.html?ref=) et le documentaire de Jean-Paul Fargier intitulé Tombeau pour l’URSS) et enfin la numérisation en 3D des fragments archéologiques et leur restitution par Rémi Méreuze. Vous pouvez librement les visionner sur le site internet sketchfab : https://sketchfab.com/remi.mereuze/collections/statues-sovietiques-de-baillet-en-france.
Un colloque réussi
La participation a tout d’abord été au rendez-vous avec 250 personnes présentes au cours des trois journées, ce qui, pour un sujet comme celui-ci, est tout à fait honorable ! La composition du public, loin de se limiter aux chercheurs universitaire et aux étudiants, s’est élargie et nous avons ainsi pu croiser des curieux, des passionnés d’architecture, des militants, mais également de nombreux habitants de Baillet-en-France lors de la dernière journée.
Difficile ensuite de résumer en quelques lignes les trente-et-une interventions prononcées au cours des deux premières journées. Les cinq premières ont été consacrées aux pavillons soviétiques des Expositions Internationales de Paris de 1925 et 1937, suivies par de passionnantes contributions sur la construction de la nouvelle ambassade soviétique à Paris, le musée Lénine à Paris, les « gratte-ciels » de Villeurbanne et la ville d’Ivry-sur-Seine, capitale du communisme français. Le dernier panel de la première journée a été consacré à une démarche comparatiste, sur la conception et le contenu du patrimoine soviétique dans les pays de l’ex-URSS. La seconde journée s’est ouverte sur une conférence exceptionnelle de Jean-Paul Demoule sur l’iconoclasme – la destruction délibérée d’images – à travers l’histoire, avant d’être suivie d’une première table-ronde consacrée aux archives et institutions muséales. La journée s’est achevée sur plusieurs interventions s’interrogeant sur la place du patrimoine artistique soviétique en France, notamment son absence au profit de l’art « non-officiel » russe dans les collections muséales. Le dernier panel a laissé la place à deux communications portant sur le regard français porté sur le patrimoine soviétique.
La CGT n’a pas été absente, avec une contribution de Pierre Coutaz sur le drapeau rouge syndical français et soviétique, d’Amaya Garcia sur la technique dite de l’« accouchement sans douleurs » et enfin d’Aurélia Dufils sur le parc de loisirs et de culture Henri-Gautier à Baillet-en-France.
Un programme varié donc, dont les premières conclusions expriment l’intérêt du questionnement à l’origine du colloque. Elles confirment tout d’abord, si besoin était, l’intérêt et la richesse du dialogue interdisciplinaire et interinstitutionnelle. Elles incitent également à poursuivre la réflexion sur l’ampleur et la nature de la présence soviétique dans le patrimoine en France. Enfin, elles incitent à travailler sur la pluralité des formes de ce patrimoine soviétique, dépassant largement les frontières du bâti monumental pour investir le champ de l’immatériel.
Rendez-vous a donc été pris pour de nouvelles initiatives, dont la première sera la publication des actes du colloque !