A travail égal, salaire égal
La loi du 22 décembre 1972 marque la première pierre de la conquête de l’égalité professionnelle. Celle-ci prévoyait que «tout employeur est tenu d’assurer, pour un même travail, ou pour un travail de valeur égale, l’égalité de rémunération entre les hommes et les femmes». En 2001, la loi «Génisson» fait de l’égalité professionnelle un sujet de négociations obligatoires dans les entreprises de plus de 50 salariés et dans les branches. Trois ans plus tard, un rapport du Sénat estimait que 72% des entreprises ne s’y étaient jamais prêtées.
Puis, il a fallut attendre la loi du 23 mars 2006 pour que l’Etat s’attaque à nouveaux aux écarts de salaires. Cette loi impose d’obtenir la fi n des écarts de rémunération à poste égal entre les deux sexes avant le 31 décembre 2010. Mais la réforme des retraites a supprimé la date butoir. Seules les entreprises qui n’ont pas conclu un accord ou un plan d’action risquent des sanctions, qui ne sont jusqu’à maintenant quasiment jamais appliquées.
Malgré les textes de loi, l’écart mensuel de revenus entre homme et femme s’élève à 27% en moyenne. Pourtant, d’après un rapport de l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Economiques), la diminution de 50% de l’écart hommes-femmes permettrait d’augmenter de 9,4% le PIB. Les inégalités persistent aussi face à la précarité. 80% des salariés rémunérés au Smic sont des femmes.
Elles occupent 82% des emplois à temps partiel (le plus souvent imposé) et 78% des emplois non qualifiés.
Les femmes premières victimes de la pénibilité
Jusqu’à la réforme des retraites de 2010, la question de la pénibilité du travail des femmes n’avait jamais été soulevée. Le rapport du Conseil Economique Social et Environnemental, commandé à cette occasion, sur la «santé des femmes en France», a fait l’effet d’une petite bombe. La pénibilité était jusqu’à maintenant cantonné aux secteurs employant majoritairement des hommes. Donc, la définition de la pénibilité d’un geste professionnel s’établissait en fonction de critères masculins. Pourtant, les femmes sont tout autant exposées à la pénibilité physique ou mentale que les hommes, mais cette exposition est souvent moins visible. Les femmes, compte tenu des emplois qu’elles occupent, sont souvent sujettes à une exposition aux risques organisationnels et psycho sociaux.
Aujourd’hui, de nombreuses études soulignent que les métiers «féminins» sont autant marqués par la pénibilité physique ou mentale que ceux des hommes et ils exposent plus aux risques musculo-squelettiques et psychosociaux : travail très répétitif, travail permanent sur écran, travail morcelé (abandon d’une tâche pour une autre plus urgente), postures contraignantes, port de charges lourdes (pas plus de 25 kg dans le droit du travail pour les femmes (or «le port» d’un corps dépasse ce niveau), manque d’autonomie dans le travail, contact avec le public (agressions verbales, violences), exposition à certains produits chimiques nocifs, horaires qui rentrent en conflit avec les obligations familiales, travail de nuit, charge mentale et émotionnelle…
Ainsi, 58% des troubles (TMS) déclarés concernent des femmes, avec un risque d’exposition de 22% supérieur à celui des hommes. Si en 2010, les accidents de travail des femmes représentent un tiers des 650 000 accidents de travail, on constate que sur la période 2000-2010, le nombre des accidents de travail est en augmentation pour les femmes (+23,4%). Il est en diminution pour les hommes (-21,3%). De même, les maladies professionnelles reconnues ont progressé deux fois plus vite pour les femmes (+179,5%) que pour les hommes (+51,9%).
D’autant que les conditions d’emplois des femmes sont souvent des facteurs aggravant des conditions de travail (postes peu qualifiés, emplois précaires). Ainsi, les femmes se déclarent plus stressées au travail (+ 40 %) que leurs collègues masculins. De plus, 37% des femmes déclarent vivre un «mal-être» au travail, contre 24% des hommes. Enfin, les femmes vivent plus fréquemment que les hommes, des situations de harcèlement et de violence.