Fernand Devaux, dernier survivant du sinistre « convoi des 45 000 », qui a relié le camp de Royallieu à Compiègne à celui d’Auschwitz-Birkenau le 6 juillet 1942, s’est éteint le 30 mars 2018 dans sa 97e année.
Les associations « Mémoire vive des convois des 45 000 et 31 000 d’Auschwitz-Birkenau » et « Mémoire d’Aincourt » organisent un hommage le samedi 23 juin 2018, à 15 heures, salle Jean-Borne, au 94 rue Jean-Pierre Timbaud à Paris (XIe arr.).
Métallo, résistant, déporté
Né le 3 janvier 1922 à Guingamp (Côtes-d’Armor), il est le cadet d’une famille de quatre enfants, dont le père est employé des chemins de fer. Au décès de son père en 1930, la famille quitte la Bretagne pour Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). Ouvrier métallurgiste de profession, il est embauché comme tôlier aux usines automobiles Hotchkiss à Saint-Denis. Adhérent aux Jeunesses communistes en 1937, il rejoint le Parti communiste et la CGT l’année suivante.
Licencié suite à sa participation aux grèves du 30 novembre 1938 contre l’entrée en vigueur des décrets-lois liquidant les conquêtes du Front populaire, il devient secrétaire des Jeunesses communistes de Saint-Denis en 1939. Résistant de la première heure, il continue de militer au parti communiste après son interdiction à l’automne 1939. Après juin 1940, il agit pour la reconstitution de la section locale des jeunesses communistes et diffuse du matériel de propagande.
Le 2 septembre 1940, il est arrêté lors d’une diffusion de tracts et incarcéré à la prison de la Santé à Paris. Libéré fin octobre, il reprend aussitôt ses activités résistantes. Le 9 novembre, il est repris et interné à Aincourt (Val-d’Oise), où il est l’un des plus jeunes. En septembre 1941, il est transféré à Rouillé (Vienne) avec 150 autres détenus. Le 22 mai 1942, il est envoyé au camp de Royallieu à Compiègne (Oise), où il est membre d’un « triangle » du Parti communiste clandestin. Désigné parmi près de 1 200 d’otages, dont 90 % de communistes, il quitte Compiègne le 6 juillet 1942 pour Auschwitz. De ce convoi des « 45 000 », en raison du matricule tatoué sur le bras des déportés, seuls 119 en reviendront en 1945.
Affecté par le typhus en août 1942, il parvient à survivre grâce à la solidarité et à l’esprit de résistance. En septembre 1944, il est transféré au KL Gross-Rosen, puis au KL d’Hersbrück et en février 1945 au KL de Flossenburg. Le 8 avril, il se trouve dans une des « marches de la mort », ces marches forcées imposées par les nazis pour évacuer les détenus face à l’avancée des troupes alliées. Ils arrivent, épuisés et affamés, le 24 avril au KL de Dachau qui est libéré cinq jours plus tard par l’armée américaine.
Le 13 mai, las d’attendre la levée de la quarantaine sanitaire imposée au camp, il s’échappe en compagnie de Georges Duval. Après un périple de cinq jours, à pied, en train et en camion, ils parviennent à Paris.
Dès le mois d’août, il retrouve son travail chez Hotchkiss, ainsi que ses activités militantes. Il entreprit plus tard des études pour devenir professeur de l’enseignement technique.
Il dut attendre 1955 pour être reconnu « déporté politique » et 1986 pour « déporté résistant ».
Le besoin de témoigner, de faire connaître l’ampleur et la nature de la barbarie nazie s’est fait ressentir. Il participe, avec Claudine Cardon-Hamet, à la rédaction du livre Triangles rouge à Auschwitz. Le convoi politique du 6 juillet 1942 paru en 2005. En 1996, il prend part à la création de l’association « Mémoire Vive des convois 31 000 et 45 000 » ainsi qu’à l’association « Mémoire d’Aincourt », tout en étant un membre actif de l’Amicale de Châteaubriant-Vôves-Rouillé-Aincourt. Intervenant régulièrement dans les écoles, il nous laisse de nombreux témoignages écrit et audiovisuel.
La Fédération CGT des travailleurs de la métallurgie s’incline avec respect et émotion devant le parcours et l’engagement de Fernand Devaux et adresse ses sincères condoléances à sa famille et à ses proches.
Son parcours sur le site de Mémoire vive : http://www.memoirevive.org/fernand-devaux-dit-nounours-45472/.