General Electric s’oriente vers un système d’évaluation à 360° par le biais d’une application mobile. Les salariés par ce système se voient donner des priorités qui évoluent en cours d’année plutôt que des objectifs annuels. Cela pourrait être le laboratoire de mise en place d’un nouveau système en France. L’évaluation est permanente, l’idée des dirigeants étant de se projeter vers l’avenir plutôt que de faire un bilan fastidieux du passé. Avec ces évaluations à 360°, les salariés peuvent commenter les « performances » de leur hiérarchie et de leurs collègues autant que l’inverse. Les appréciations ne sont pas anonymes, la direction souhaitant que les salariés agissent de manière responsable.
Pour quel objectif ?
L’objectif affiché par cette méthode serait d’encourager le conseil et le développement plus que les critiques. Elle serait également une réponse pour les jeunes qui trouvent cela plus naturel. Avec ce nouvel outil, la direction évoque la volonté de sortir de la mesure des performances et des comportements afin de mobiliser davantage le salarié vers le développement personnel. Mais ce dispositif n’aborde pas spécifiquement ni la formation ni l’évolution de carrière. Il est demandé à la hiérarchie de réaliser un échange sur l’évolution de carrière, mais sera–t-il prit en compte ? Les salariés précisent que ce n’est pas par le biais ce dispositif qu’ils ont progressé, mais parce qu’ils ont recherché un nouveau poste.
La manipulation des comportements
Le dispositif vise également à ce que les salariés s’approprient la culture d’entreprise pour devenir un « petit auto-entrepreneur » qui a l’autonomie et les responsabilités nécessaires pour atteindre les objectifs fixés. Le salarié hiérarchise ses priorités. Il fait la synthèse de ses contributions et il doit s’auto-développer sur la base d’observations faites par n’importe quel salarié avec qui il sera en contact. Aussi, s’il échoue, il se sentira seul responsable de son échec car il dispose de tous les outils pour agir.
La culture de l’excellence
Le levier utilisé avec cet outil un détournement majeur des aspirations des ICT de reconnaissance du travail bien fait comme vecteur de réussite. La valeur de l’excellence est étroitement liée à la notion de performance, car il s’agit de faire mieux que les autres, d’arriver au sommet,…Ce modèle repose notamment sur l’engagement total du salarié afin que les objectifs de l’entreprise soient atteints. Les entreprises ont compris que la captation de l’énergie psychique des salariés est un moteur efficace afin d’atteindre leurs objectifs économiques. La psychologie du travail a déjà montré la centralité du travail, permettant aux entreprises de laisser croire aux salariés que les buts poursuivis par l’entreprise et ceux des salariés concordent, constituant ainsi une perspective unique. L’enjeu est que les salariés intériorisent les valeurs, les objectifs et les logiques capitalistiques de l’entreprise afin d’y adhérer.
Évaluer le travail et son organisation et non les personnes
S’il est nécessaire pour l’entreprise d’adopter les nouvelles technologies, les évaluations doivent toutefois répondre à des règles qui se recentrent sur le travail. Comment et avec quel moyen les salariés peuvent-ils ou doivent-ils le réaliser ? L’organisation est-elle efficace dans la résolution des problèmes ? Préserve-t-elle la santé mentale et physique de ses salariés ? Les orientations stratégiques et économiques, sont elles en cohérence avec les moyens alloués ? … Bref, évaluer le travail avant de s’intéresser à l’individu, c’est évaluer l’organisation et les conditions de travail dans lequel il est amené à le réaliser. Lancer ce débat, pour anticiper la mise en place d’un projet patronal comme celui-ci, c’est se donner les moyens de construire une alternative à cette nouvelle forme de domination patronale.
Le guide pratique de l’entretien d’évaluation de l’UFICT est toujours disponible sur simple demande par mail à : ufict@ftm-cgt.fr