Née Klein le 3 décembre 1924 à Vienne, en Autriche, sa mère est issue d’une famille juive polonaise, tandis que son père avait fui la Hongrie en 1920 pour échapper à la répression qui frappait alors les partisans de Béla Kun. Verrier de profession, il était socialiste de conviction, sans pour autant être militant.

L’Anschluss, c’est-à-dire l’absorption de l’Autriche par l’Allemagne nazie en mars 1938, s’accompagne rapidement d’une vague d’antisémitisme. Exclue de l’école, elle suit alors des formations d’esthéticienne et de coiffeuse.

Elle quitte Vienne avec ses parents en août 1939 et parvient à se rendre à Bruxelles. Le lendemain de leur arrivée, l’Allemagne attaque la Pologne, marquant ainsi le début de la Seconde Guerre mondiale.

Ils y retrouvent ses grands-parents et sont aidés par le « Comité des réfugiés », parmi lesquels de nombreux militants socialistes et communistes sont présents. Nelly Sturm ne tarde pas à adhérer à un groupe de jeunesses communistes.

Durant l’offensive allemande en mai 1940, son père est expulsé par les autorités belges. Il décèdera en déportation, tout comme sa mère, arrêtée en 1943 par les Allemands.

Le pays est occupé et sa famille doit affronter les pénuries et les rafles policières. Nelly Sturm parvient à survivre comme employée de maison.

Elle intègre la résistance à l’automne 1941 au sein de l’organisation clandestine « Travail allemand », qui regroupe une grande majorité de jeunes filles d’origine juive autrichienne, ainsi que quelques allemandes, tchèques, polonaises et belges. Leur tâche consiste à prendre contact avec les soldats allemands ou autrichiens durant leur temps libre. Elles se font passer pour des belges, ayant des parents alsaciens, désireuses d’améliorer leur pratique de la langue allemande. Au fil des contacts, elles essaient d’en savoir plus sur l’état d’esprit du soldat pour éventuellement lui donner à lire un tract ou un petit journal clandestin.

Cette entreprise de démoralisation et de pénétration de l’armée, extrêmement dangereuse, a eu des résultats modestes mais positifs, selon sa propre analyse. Elle poursuit son travail, après Bruxelles, à Gand, Charleroi, Liège et enfin Anvers, où elle échappe de peu à une arrestation par la Gestapo en 1944.

Sur la cinquantaine de membres du « Travail allemand » en 1941, seule une vingtaine a survécu à la Libération.

Elle est rapatriée à Vienne au début de l’été 1945. Elle rencontre un comédien qui travaille dans un théâtre progressiste de Vienne et quitte, avec sa fille née en 1950, Vienne pour l’Allemagne de l’Est en 1956.

Henri Tronchon et Jacques Trégaro nous rappelle qu’elle fut permanente de la Fédération. De 1967 à 1976, elle fut chargée de l’activité en direction des militants métallurgistes de l’Allemagne de l’Ouest et réalisa un  travail  ardu de lecture et d’analyse des documents syndicaux du DGB et plus particulièrement de l’IG Metall. À ce titre, elle était interprète de la Fédération et traductrice du Courrier Fédéral en langue allemande. Cette parution, quasi-mensuelle, visait à nourrir les liens avec les militants de l’IG Metall et les informer sur les activités de notre fédération, les luttes en cours et le processus d’unité syndicale à l’œuvre en France.

Il n’y avait alors aucune relation entre les deux organisations syndicales, mais ce travail patient a permis de déboucher sur quelques avancées concrètes.

C’est ainsi qu’au début des années soixante-dix, la Fédération fut invitée en tant qu’observateur au congrès de l’IG Metall à Munich. Georges Croese, membre de la commission exécutive de la CGT, représentait La Vie ouvrière, Henri Beaumont représentait Le Peuple, Henri Tronchon représentait L’Union des métaux et Nelly Sturm accompagnait la délégation. À l’issue du congrès, Otto Brenner, président de l’IG Metall, accepta de saluer la délégation française, une petite victoire symbolique !

Elle s’est également attaquée au problème des « Berufsverbote », les « Interdits professionnels », ces salariés militants de gauche qui sont interdits de travail dans les administrations nationales et régionales en Allemagne. Plusieurs fédérations de la CGT se sont alors investies dans des campagnes d’action, de solidarité pour mettre fin à ces discriminations. Des délégations de syndicalistes CGT se rendirent sur place pour soutenir ce combat.

Nelly Sturm fit la connaissance de Marcel Dufriche, ancien résistant, syndicaliste et maire de Montreuil avec qui elle vécu jusqu’à son décès en 2001.

Retournée à Berlin auprès de sa fille, elle est décédée à l’âge de 92 ans.

A sa famille, à ses amis, nous exprimons nos sincères condoléances et notre amitié.

Pour aller plus loin

Claude Collin, « Nelly Sturm : ce qu’on appelait le  » travail allemand  » (entretien avec l’auteur) », Guerres mondiales et conflits contemporains, 2003, n° 212, p. 33-49. En ligne : http://www.cairn.info/revue-guerres-mondiales-et-conflits-contemporains-2003-4-page-33.htm.