L’ensemble des syndicats CGT du groupe Renault se sont réunis le jeudi 12 janvier 2017 afin de définir leur position concernant l’accord compétitivité pluriannuel 2017–2019 intitulé : « Renault France – CAP 2020, contrat d’activité pour une performance durable de Renault en France ». A l’unanimité, les syndicats CGT du groupe Renault se sont exprimés contre la signature de cet accord pour de nombreuses raisons.
Le bilan de l’accord 2013-2016 et la situation financière de l’entreprise totalement ignorée !
Un bilan social catastrophique
Tout au long des discussions, la CGT a démontré les effets désastreux de l’accord 2013–2016 :
- Plus de 7000 emplois CDI supprimés en intégrant les 3000 embauches annoncées (soit plus de 10000 départs de l’entreprise).
- Une réduction drastique des jours de RTT, des temps de pause, de respiration…
- Une augmentation du temps de travail, avec l’explosion des heures supplémentaires (plus de 2 millions sur le seul site de Maubeuge en 2016).
- Une précarisation des emplois avec près 10000 intérimaires présents dans les sites industriels.
- Une amplification de la sous-traitance avec plus de 5000 prestataires dans l’ingénierie…
- La suppression des Augmentations Générales des Salaires pour toutes les catégories professionnelles, avec une baisse notable du pouvoir d’achat des APR, ETAM et Cadres…
C’est la facture payée par l’ensemble des salariés au cours de ces 3 dernières années avec une dégradation considérable des conditions de vie et de travail pour toutes les catégories professionnelles et statuts (intérimaires, prestataires, CDD…).
Mauvais pour les salariés et mauvais pour l’entreprise !
La perte des savoir-faire, le turn-over récurrent, le sous-effectif, les heures supplémentaires… ont fortement handicapé l’entreprise dans sa capacité à concevoir, fabriquer et livrer des véhicules à la hauteur des aspirations des salariés et des clients (Qualité, prix de ventes, délais…). Et personne, pas même la direction, ne peut contester cet état de fait !
Des sacrifices au seul bénéfice de quelque uns !
Et pendant ce temps-là, les actionnaires, les dirigeants de l’entreprise et son PDG ont explosé leurs dividendes, la valeur de leurs actions et leur rémunération ! Le journal patronal Les Echos du 12 décembre dernier, titrait « Renault et PSA, nouveau champion de la rentabilité ». Le journal précisait, « que même les analystes n’en reviennent pas… on est à des niveaux historiques…. Avec des marges supérieures à 5%, ils sont très au-delà des 1 ou 3 % des marges d’avant crise, il y a 10 ans… ».
Les mêmes analystes affirment encore que « …si le rebond du marché européen depuis deux ans a aidé Renault grâce au renouvellement complet de sa gamme…. L’essentiel vient d’ailleurs… et réside dans l’impressionnante chasse aux coûts engagée depuis quelques temps (plan de départs de salariés, augmentation du temps de travail, gel des salaires… ».
On ne peut être plus clair, il y a ceux qui triment, qui paient (les salariés) et les autres qui ramassent (les actionnaires et les dirigeants) !
En 2012, la direction avait prétexté la crise de l’automobile pour imposer l’accord compétitivité du 13 mars 2013 avec le chantage de possibles fermeture d’usines. A défaut de renouveler le scénario en 2017, elle prétexte cette fois, les « évolutions technologiques et mutations en rapport avec la mobilité… ».
Accord Cap-2020 : un marché de dupes !
Mais au final, toutes les catégories professionnelles sont une nouvelle fois invitées à poursuivre « les efforts » et payer la facture ! C’est la continuité de l’accord de 2013 !
L’accord de plus d’une centaine de pages précise qu’il prévoit « …des engagements réciproques en termes d’activité et de performance… ». Ceux exigés des salariés sont explicites, mais ceux de la direction n’existent pas !
Les salariés devront atteindre 41% de gains de productivité en obtenant le montage de 90 Véh/an/salarié d’ici 2019 (contre 64 aujourd’hui selon les normes de la direction). Les 3600 embauches en CDI (avec moins de la moitié pour les APR) ne combleront pas les 4500 départs CDI de l’entreprise et les 4 500 intérimaires environ (sur les 10000 actuellement) qui seront supprimés d’ici 2019. Soit une nouvelle perte sèche de près de 6 000 emplois. Le niveau « d’automatisation et de flexibilisation des lignes » ne dépassera pas 10% et 12% maximum. La sous-traitance dans l’ingénierie ne baissera pas mais devra se faire avec moins de prestataires et « compléter par des partenariats spécifiques… » !
Dans ces conditions, Les salariés seront invités à poursuivre « au volontariat » la réalisation des heures supplémentaires… (incitées par une politique salariale à minima) A défaut d’être suffisant, le temps de travail sera de nouveau augmenté de manière obligatoire avec +1h par jour sur 50 séances de travail par an (8 par mois au maxi). En portant le contingent d’heures supplémentaires à 210 h contre 175 actuellement, (une durée annuelle pouvant aller jusqu’à 1813 heures contre 1 603 heures (réf. légale). La récupération possible de 7 samedis obligatoires par an dans le cadre du Capital Temps Collectif. Et le tout, avec un délai de prévenance de 2 jours pour « circonstances exceptionnelles ». Ceux qui n’auront pas 15 ans d’équipes ou 10% d’IPP sont exclus des mesures de départs.
Ce sont encore les salariés qui resteront qui devront absorber le travail de ceux qui quitteront l’entreprise. Des conditions de vie et de travail déjà largement dégradées et qui vont encore empirer.
Et la direction ne s’engage à rien :
« Le volume annuel moyen sera au moins égal » à celui de 2016. C’est à dire, au niveau des marchés actuels et, qui selon les précisions, devraient être à la hausse d’ici 2019.
Les 500 millions d’investissements, les 220 millions d’€ liés à la formation ou enfin, les dépenses d’investissements de Recherche et Développement et Capex, représentant au moins 8% du chiffre d’affaires du groupe Renault, sont des budgets qui ne sont pas supérieurs aux années passées et qui relèvent du fonctionnement (à minima) normal et légal d’une entreprise. Et accord ou pas, ils seront mis en œuvre.
Enfin, la question des salaires est renvoyée à une autre négociation tout en évacuant la nécessaire Augmentation Générale des Salaires. Quant à la reconnaissance des qualifications, la direction attend avec impatience la finalisation des propositions du patronat dans le cadre des négociations dans la branche (nous y reviendrons). Ce qui lui permettrait d’embaucher les futurs CDI Renault dans des conditions sociales très en deçà des conditions actuelles (suppression de la prime d’ancienneté, reconnaissance très partielle des diplômes, fin des AGS…)
La CGT ne légitimera pas la poursuite des reculs sociaux pour les salariés !
Pour toutes ces raisons (il y en a beaucoup d’autres sur lesquelles elle reviendra), la CGT Renault ne signera pas cet accord ! Elle ne confortera pas la direction à poursuivre le dé-tricotage des acquis sociaux obtenus par les générations précédentes aux seules fins de l’intérêt des actionnaires et dirigeants de l’entreprise.
Au contraire, la CGT va continuer à jouer son rôle de syndicaliste pour avec les salariés, construire un rapport de force leur permettant d’obtenir ce qui leur revient dans la part des richesses qu’ils créent. Et dans les faits, rendre inapplicable cet accord !